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Xavier Remongin / agriculture.gouv.fr

15 juin 2016 Info +

Du safran en Bretagne : à la découverte de l'or rouge !

À Guégon, dans le Morbihan, Jean-Vincent Le Berre cultive le safran depuis 2010. Ce jeune agriculteur de 33 ans, diplômé en Sciences et techniques d’agronomie et de l’environnement, nous fait découvrir cette épice appelée aussi « l’or rouge ». Interview.

Qu’est-ce que le safran ? JEAN-VINCENT LE BERRE : C’est la seule épice issue d’une fleur. Le safran désigne les filaments du crocus sativus, seule plante dont les bulbes dorment l’été et se réveillent à l’automne pour la floraison. Elle est en culture inversée par rapport au reste du monde végétal.

Comment le cultive-t-on ? JEAN-VINCENT LE BERRE : Pour pousser, la fleur de safran a besoin d’une forte amplitude thermique, c’est-à-dire d’une grande différence de température entre l’été et l’hiver et le jour et la nuit. Les fleurs de safran s’ouvrent à l’automne durant l’été indien. Dans les pays chauds, le safran n’est pas cultivé en plein désert mais au bas des montagnes.

Est-ce facile de cultiver une plante comme le safran en Bretagne ? JEAN-VINCENT LE BERRE : L’idéal est d’avoir une terre limono-sableuse, qui l’évacue assez rapidement. S’il y en a trop, il y aura un pourrissement de la plante. Je cultive sur une terre où il y a des grandes différences de température : c’est parfait pour le safran.

Comment s’effectue la récolte ? JEAN-VINCENT LE BERRE : Lorsque les conditions sont réunies au niveau climatique, la safranière se réveille et lance une floraison. La nuit, les fleurs sortent de terre, et le matin il y en a partout, c’est magique. Je les récolte à la main lorsqu’elles sont fermées, car je ne veux pas que le soleil abîme les filaments ou qu’ils prennent la poussière.

Jean-Vincent Le Berre, producteur de safran ©JVLB
jean vincent le berre crocus sativus safran

Comment « extrait » - on le safran ? JEAN-VINCENT LE BERRE : Par émondage. C’est une opération délicate qui consiste à séparer les stigmates de la fleur de crocus sativus. Ensuite, je les fais sécher près d’une source de chaleur, et non de façon naturelle afin qu’ils gardent cette couleur sang de bœuf. C’est à ce moment là qu’on obtient l’épice. Je les laisse refroidir pour les mettre ensuite dans des pots en verre, vides d’air et dans le noir, où ils maturent pendant deux mois. C’est une technique de la région de la Mancha en Espagne.

Quelles sont les caractéristiques d’un bon safran ? JEAN-VINCENT LE BERRE : En plus de colorer un plat, le safran a une saveur bien particulière. C’est un exhausteur de goût. Il fonctionne avec le sucré, le salé mais aussi les alcools. Comme un bon vin, il donne un arrière goût au plat. Personnellement, j’en utilise même dans mon café !

Quels conseils pouvez-vous donner à nos Internautes pour bien le déguster ? JEAN-VINCENT LE BERRE : Pour cuisiner, on utilise en général deux à trois filaments par personnes. Contrairement au poivre ou au piment, le safran a besoin d’être infusé pendant une heure minimum dans du liquide (lait, eau tiède, sauce) pour diffuser son arôme.

Jean-Vincent Le Berre vend son safran sous forme de filaments et non de poudre ©JVLB
pot safran bretagne filaments

Vous fournissez de grands chefs comme Olivier Roellinger [1] , comment les avez-vous rencontrés ? JEAN-VINCENT LE BERRE : J’ai commencé par démarcher les restaurants. Cela a beaucoup surpris les chefs de savoir qu’il y avait du safran cultivé en Bretagne. Ils l’ont comparé avec celui d’autres producteurs. L’odeur les a surpris, car elle diffère selon l’endroit dans lequel le safran est produit. Je ne le vends que sous forme de filaments : c’est ce que veulent les restaurateurs et c’est de meilleure qualité. En utilisant le safran on peut décrocher les étoiles !

Pour en savoir plus sur l’exploitation de Jean-Vincent Le Berre, rendez-vous sur son site internet

[1] chef et créateur du restaurant triplement étoilé, la Maison de Bricourt, à Cancale en Bretagne