Dans le Finistère, un élevage de lapins réalise le « zéro antibiotique »
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Comme chez l’homme, les animaux sont parfois victimes d’infections microbiennes que l’on soigne à l’aide de traitements antibiotiques. Mais des alternatives existent pour éviter d’y recourir systématiquement. Dans le Finistère, Yvonne Colin a atteint son objectif du « zéro antibiotique » en améliorant l’hygiène, le confort et l’alimentation de ses lapins. Une démarche qui s’inscrit dans la dynamique du plan « Ecoantibio ».
Anne Yvonne Colin élève des lapins à Ploudalmézeau, dans le Finistère. Si elle travaille de manière conventionnelle, elle a cependant décidé de réduire l’utilisation des antibiotiques jusqu’à leur suppression. De ses expériences professionnelles dans le secteur de la banque, du bâtiment et à l’étranger, cette agricultrice bretonne a développé une palette de compétences qui lui ont permis de mener à bien son projet cunicole.
C’est dans son exploitation de 40 hectares qu’Anne Yvonne s’est installée en 2003 avec son frère et son mari. Ce dernier, docteur en nutrition, dirige une société de conseils pour laquelle Anne Yvonne travaille à mi-temps. Son frère,élève, lui, des vaches laitières. Pour les vaches comme pour les lapins, ces agriculteurs produisent eux mêmes une grande partie de l’alimentation animale notamment à partir de leurs cultures de colza et de féverole. Mais surtout, ils ont fait le choix de « démédiquer l’élevage de lapins » en réduisant fortement l’utilisation des antibiotiques vétérinaires.
« Je donne du confort à mes animaux »
La maternité des lapins est une étape cruciale pour éviter les maladies qui pourraient se déclencher ensuite pendant l’engraissement. Il convient notamment de refaire les nids des lapereaux huit jours environ après la mise bas. Cette pratique Anne Yvonne Colin l’a testée dans un moment de crise : les portées de lapins étaient victimes de diarrhées. Elles attendaient un traitement antibiotique d’un vétérinaire qui ne pouvait pas lui parvenir avant deux jours au moins. Pendant ce délai, elle risquait de perdre tous ses lapereaux. Elle a donc décidé de refaire les nids en changeant notamment les copeaux.La contamination a cessé. Depuis elle s’est progressivement passée d’antibiotiques et observe son élevage de près. « C’est la méthode empirique » précise l’agricultrice.
Réduire les traitements antibiotiques c’est repenser les conditions d’hygiène de ses animaux mais aussi leurs conditions de vie en leur assurant du confort. Les bâtiments de l’exploitation disposent en effet de systèmes de chauffage, d’aération et d’isolation assurant un climat sain pour les lapins à tous les stades de leur élevage.« De l’air mais sans courants d’air » explique Anne Yvonne Colin.
L’introduction d’acides gras oméga 3 dans l’alimentation des lapins fait aussi partie du processus pour préserver la bonne santé des animaux. En effet, Anne Yvonne a constaté une amélioration de la résistance des lapines en testant ce nouveau régime alimentaire. La productrice bretonne est affiliée à l’association Bleu,blanc,cœur : l’objectif est de créer un cercle vertueux en nourrissant mieux les animaux pour une meilleure santé de l’Homme et un environnement respecté pour de meilleurs produits.
Par quoi remplace t-on les antibiotiques ?
Cette agricultrice bretonne recommande la phytothérapie, les huiles essentielles intégrées à l’alimentation ou encore les probiotiques qu’elle utilise depuis maintenant trois ans dans sa maternité. Mais si aujourd’hui elle a atteint son objectif de « 0 antibiotiques » elle n’est pas opposée à leur utilisation. Jusqu’à présent, ses techniques, qu’elles soient liées à l’hygiène, aux conditions de vie des animaux ou à la nutrition, lui permettent simplement de s’en passer. Elle n’est pas fondamentalement opposée à utiliser des antibiotiques dans le futur, si cela était nécessaire.
Combien ça coûte ?
Ces méthodes alternatives ne coûtent pas moins cher que les antibiotiques. Elles coûtent peut être même davantage selon Madame Colin car « elles demandent plus d’effort pour l’agriculteur ». Pour autant, ses activités de recherche lui assurent un complément de revenu significatif. Il reste à amortir les investissements.
Et pour se lancer ?
Être prudent, une recommandation qui revient souvent dans les propos de cette pionnière finistérienne. En effet, il convient de prendre des risques mais toujours progressivement et surtout « il faut savoir s’entourer ». Anne Yvonne a en effet pu compter sur un groupement de producteurs dont elle a bénéficié des conseils techniques. Les échanges avec les agriculteurs, toutes productions confondues, sont aussi essentiels. En outre, elle participe régulièrement à un groupe de travail au sein de la Chambre d’agriculture sur ces thématiques.
Aujourd’hui Anne Yvonne Colin regrette cependant que les 12 000 à 13 000 lapins produits annuellement ne soient pas mieux valorisés : ils sont en effet vendus aux abattoirs locaux et ne sont pas identifiés par le consommateur. Mais dynamique, elle pense déjà à la suite avec l’installation prochaine d’un atelier à la ferme. Affaire à suivre.