27 juin 2019 Publication

État des lieux de la recherche et de la formation dans le secteur des semences végétales

  • Étienne Achille
  • Sylvie Dutartre

Le CGAAER a été chargé de faire un état des lieux de la recherche et de la formation dans le secteur des semences végétales et dans le cadre du plan «semences pour une agriculture durable»

Évaluation et expertise n° 17104

Mars 2019

Mots-clés : semences, amélioration des plantes, sélection, variété, recherche, formation, enseignement agricole, enseignement supérieur, génétique, biotechnologie

Enjeux

Les semences végétales sont un enjeu stratégique : la France en est le premier producteur européen et le second exportateur mondial. Le solde de sa balance commerciale est positif et en hausse continue depuis dix ans, atteignant un niveau record de 901 M€ en 2016.

Pour défendre et développer ce secteur, le ministère de l'Agriculture a conçu dès 2011 un premier plan «Semences pour une agriculture durable».

Ce plan fait partie d'une stratégie plus large visant à faciliter l'innovation dans l’amélioration variétale et la qualité des semences en vue de défendre la compétitivité des entreprises, de mettre sur le marché des semences de qualité, des variétés réduisant la consommation de produits phytopharmaceutiques - en lien avec le plan Ecophyto 2+ - et d'adapter les cultures au changement climatique.

Après son évaluation en 2015, le plan « Semences pour une agriculture durable » a été actualisé en 2016. Il prévoit notamment de réaliser l'état des lieux des compétences de l’appareil de recherche et des dispositifs de formation du secteur.

Méthodologie

La mission a été réalisée selon une méthode fondée sur des entretiens, avec les acteurs de la filière et l’examen des documents liés au thème de la mission.

Résumé

Fort d'un chiffre d'affaires de 3,6 Mds€, le secteur des semences végétales employait 11 664 ETP en 2016 (+25 % par rapport à 2011), auxquels s'ajoutaient 18 961 agriculteurs multiplicateurs de semences. L'investissement dans la recherche est en moyenne de 13 % du chiffre d'affaires, de quatre points supérieurs à ceux de la pharmacie ou de l'aéronautique. L'emploi dans la recherche y a progressé de 38 % de 2011 à 2016.

Une bonne concertation entre pouvoirs publics, professionnels de l'amont et de l'aval et acteurs de la recherche s'opère au sein du Comité technique permanent de la sélection (CTPS), qui régit depuis 1942 l'inscription au catalogue français des plantes cultivées. Les acteurs de la recherche et les professionnels ont ainsi pu bénéficier des financements du Programme d'investissements d'avenir (PIA) pour six grands projets d'amélioration variétale. La plupart est arrivée à échéance en 2019, en coïncidence avec la fin d'une période de recomposition mondiale du secteur et la montée de l'enjeu des biotechnologies.

La recherche française est ancrée dans une longue tradition et inscrite dans une dynamique scientifique, tant publique que privée. Elle est toutefois exposée à de nombreux défis : fin du cycle du Programme d'investissements d'avenir, impossibilité européenne renforcée d'utiliser les biotechnologies de sélection génétique, perte de biodiversité appelant une diversification des cultures et l'exploration du microbiote du sol, besoin d'apporter des réponses plus rapides pour s'adapter au changement climatique. Pour relever ces défis, un effort national et européen est essentiel car la concurrence américaine et asiatique est de plus en plus forte. La mission préconise de relancer le développement variétal sur des espèces pour lesquelles le catalogue français est mal pourvu, de faire davantage évaluer les mélanges, de lancer une expertise scientifique pour évaluer les semences dites paysannes, de mieux reconnaître la conservation des ressources phytogénétiques par des structures publiques et de lancer une expertise scientifique collective des nouvelles biotechnologies de sélection.

En ce qui concerne l'offre de formation, la qualité de l'enseignement agronomique français est menacée. La visibilité et l'attractivité de ses cursus se sont réduites depuis une décennie dans l'enseignement technique comme dans l'enseignement supérieur : image dégradée (effet « Monsanto ») et prééminence de l'animal par rapport au végétal en sont les principales causes. Les écoles d'ingénieurs agronomes et les universités se sont adaptées à cette évolution. Pour autant, l'offre de formation demeure dispersée et insuffisamment coordonnée sur le territoire en comparaison de ses principaux concurrents étrangers. La mission préconise de recréer les conditions de visibilité et d'attractivité de ces cursus dès l'enseignement technique agricole, d'utiliser les compétences actuellement prisées en bio-informatique, mathématiques et statistiques comme leviers de relance de l'attractivité de ces filières dans l'enseignement supérieur, d'y construire des formations en amélioration variétale communes aux grandes écoles d'agronomie en lien avec l'INRA, et de susciter une coordination interministérielle des cursus Bac+5 en biologie végétale et en amélioration variétale.

Les enjeux de ce secteur essentiel appellent une stratégie française forte de recherche et de formation associant le secteur privé, impulsée par les pouvoirs publics et coordonnée autant que possible à l'échelle européenne.

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