Dispositif de biocontrôle dans un arbre
Eric Veyret

25 février 2022 Info +

Les atouts du biocontrôle : interview de Denis Longevialle, secrétaire général d’IBMA France

Les produits de biocontrôle sont de plus en plus utilisés dans le secteur agricole. Entre pistes de développement et résultats très probants, voici une interview de Denis Longevialle, secrétaire général d’IBMA France (association des entreprises de produits de biocontrôle en France).

À quand remonte l’utilisation de solutions de biocontrôle en France ?

En France, des solutions comme le soufre sont utilisées depuis plus d’un siècle, le terme de « biocontrôle » n’existait pas encore. Le premier emploi en Europe des macro-organismes remonte quant à lui aux années 1970. Plus récemment encore, début 2000, la diffusion de phéromones dans les vergers a été initiée comme technique de confusion sexuelle.

Existe-t-il des disparités en fonction des secteurs ?

En agriculture, il existe davantage de solutions de biocontrôle pour les cultures spécialisées (en viticulture, en arboriculture et pour le maraîchage) qu’en grandes cultures (céréales, oléagineux, protéagineux, betteraves, pommes de terre…) et davantage en cultures sous abris qu’en cultures de plein champ. Le biocontrôle est ainsi bien développé dans le maraîchage sous serre. L’emploi du biocontrôle se développe par ailleurs pour l’entretien des espaces verts et des jardins particuliers, favorisé par l’interdiction de l’emploi des produits phytosanitaires conventionnels.

Les usages des produits de protection des plantes sont la plupart du temps définis par un triptyque « Groupe de cultures - Mode d’application - Fonction ou Groupe de bioagresseurs », par exemple « Cultures légumières – Traitement du sol - Limaces et escargots ». Tous les usages agricoles ne sont pas encore couverts par les produits de biocontrôle : 54% des usages disposaient au moins d’une solution de biocontrôle fin 2021. L’accélération de la recherche et celle de l’accès à l’innovation demeureront les priorités des années 2020. Notre ambition à IBMA France est de faire en sorte que la majorité des usages puisse disposer d’au moins deux solutions de biocontrôle à modes d’actions complémentaires d’ici 2030.

Comment favoriser davantage le développement du biocontrôle ?

L’une des avancées majeures depuis la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt (octobre 2014) est que les processus d’évaluation et d’autorisation de mise sur le marché des produits de biocontrôle sont accélérés, sans toutefois atteindre encore les délais de décision inscrits dans les textes : entre 6 à 8 mois pour les produits de biocontrôle contre 12 pour des produits phytopharmaceutiques conventionnels.

Tout en veillant à accélérer davantage ces processus pour se rapprocher des délais fixés, ces avancées doivent maintenant suivre au niveau européen, avec la prise en compte de mesures favorables au développement du biocontrôle pour ce qui est du ressort de l’Union européenne.

Il faut par ailleurs accélérer la recherche sur le biocontrôle, les entreprises s’y emploient comme les acteurs de la recherche publique. Ces travaux doivent dépasser le seul cadre de la recherche sur les produits de biocontrôle et intégrer les combinaisons de différentes solutions alternatives.

Il faut également développer davantage l’information et la formation des agriculteurs, des professionnels des espaces verts et des jardiniers amateurs à ces nouvelles pratiques. L’information devra passer notamment par des démonstrations en régions pour qu’ils se les approprient en plus grand nombre.

Plus de 2 agriculteurs sur 3 utilisent des produits de biocontrôle, et près de 3 agriculteurs sur 4 n'utilisant pas de produits de biocontrôle pourraient l'envisager.

(Source : enquête sur le biocontrôle réalisée pour IBMA France par la Junior entreprise AgroParisTech Service étude)

  • 2011 : le biocontrôle est reconnu par les pouvoirs publics comme une alternative clé aux produits phytosanitaires conventionnels. Le rapport du député Antoine Herth (mandaté par le Premier ministre et le ministre de l’Agriculture) permet d’avoir plus de visibilité sur l’intérêt très favorable de ces solutions alternatives dans le cadre du plan Écophyto. S’en suit l’élaboration d’une feuille de route ;
    2014 : promulgation de la loi d’Avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt en octobre qui inscrit une définition du biocontrôle dans le Code rural. Le biocontrôle est alors identifié parmi les fondamentaux de l’agroécologie et de nombreuses mesures sont prises pour son développement ;
    2018 : promulgation de la loi EGAlim, qui instaure une Stratégie nationale de déploiement du biocontrôle ;
    2020 : lancement de la Stratégie nationale de déploiement du biocontrôle qui identifie 4 axes prioritaires et fixe des objectifs pour 2025.

Recherche : un consortium public/privé pour déployer le biocontrôle en France

Un consortium public-privé « Recherche – Développement – Innovation » sur le biocontrôle a été lancé en France en 2016. Son objectif : favoriser l'usage du biocontrôle et soutenir la création d'une activité industrielle dans ce secteur.

Il compte une soixantaine de membres des secteurs public et privé (centres ou instituts de recherche académique, instituts techniques agricoles, entreprises du biocontrôle,…). Leurs travaux visent à proposer un programme scientifique et technique d'intérêt collectif à toutes les parties prenantes et donc de contribuer in fine au déploiement du biocontrôle via la recherche et l’innovation. Des projets de recherche sont également cofinancés par le consortium.

* Créé en 1999 pour soutenir le développement du biocontrôle en France, IBMA France représente les entreprises de produits de biocontrôle auprès des pouvoirs publics, instituts de recherche, distributeurs et prescripteurs. Ses adhérents réalisent 90% du marché du biocontrôle en France.

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