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agriculture.gouv.fr

21 octobre 2019 Info +

Développement durable : « il faut s’appuyer sur la dynamique internationale pour aller plus loin »

Ancien conseiller auprès du représentant français à l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques) et actuellement en poste au CGAAER depuis six ans, Jean-Jacques Bénézit a été nommé Haut fonctionnaire de développement durable au ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation en 2017. Il fait le point sur sa mission et les Objectifs de développement durable (ODD) dont le ministère est directement pilote.

En quoi consiste votre mission ?

« Il existe un Haut fonctionnaire de développement durable par ministère ; il est le point central, le référent dans ce domaine pour l’ensemble du ministère. Il s’agit de coordonner, de partager les informations, de les diffuser. Il s’agit aussi d’impulser et d’inscrire le ministère dans des processus internationaux, comme celui des Objectifs de développement durable (ODD). Nous sommes actuellement au début de la mise en œuvre de l’Agenda 2030, avec ses 17 ODD actés en septembre 2015 par les 193 pays membres de l’ONU. En France, c’est le ministère de la Transition écologique et solidaire qui coordonne et dirige la mise en œuvre du processus et de son reporting. »

Quel est le rôle du ministère dans la mise en œuvre de l'Agenda 2030 ?

« Les 17 objectifs – qui sont parfois décrits comme les 5P (planète, paix, populations, prospérité, partenariats) – concernent tous les domaines : l’éducation, la santé, la consommation, l’énergie, le climat, l’agriculture, les océans... et tous les acteurs, publics et privés, par exemple aussi bien les ONG que les entreprises. Tous les objectifs sont de plus interconnectés entre eux. Une attention spécifique est portée pour que le développement ne laisse personne de côté. Le ministère a été désigné comme pilote pour deux d’entre eux, le n°2, Agriculture et Alimentation, et le n°14, Pêche et Océans. Pour suivre les progrès vers l’atteinte des cibles nous disposons d’indicateurs de suivi. Pendant toute une année, la France a travaillé à mettre en place, avec le Cnis et l’Insee notamment, ses indicateurs propres, de façon précise et ciblée. »

Comment travaillez-vous sur ces deux objectifs pilotés par le ministère ?

« En premier lieu, il s’est agi de faire un état des lieux, un diagnostic, et d’établir un plan d’action. C’est ce qui a été fait en 2017 et 2018, après avoir rassemblé et consulté tout un ensemble de « parties prenantes » : les syndicats agricoles, ONG, associations de défense de l’environnement, associations de lutte contre la pauvreté, comme ATD Quart Monde ou le Secours catholique…Ce bilan/diagnostic permet de mettre en cohérence tout ce qui existait déjà. Il met en évidence des points à travailler, comme par exemple la perte des terres agricoles par artificialisation ou les problématiques de l’eau. La démarche de l’agroécologie prend ici tout son sens, ainsi que les différentes initiatives déjà en cours (Programme national de l’alimentation et de la nutrition, plan Écophyto, démarche 4 pour 1000...). Cela concerne aussi des aspects sociaux et économiques, car le développement durable est indissociable de ces dimensions, parfois moins mises en avant. Il faut toutefois rappeler que l’agriculture est une politique européenne, que nous ne sommes pas seuls décisionnaires à ce sujet. »

Quels sont les autres leviers pour atteindre ces deux objectifs ?

« La démarche ODD peut réussir s’il y a notamment une rupture ou un changement dans les esprits et les façons de faire. Pour l’initier, l’enseignement et la recherche sont fondamentaux et le ministère de l’Agriculture a la chance de disposer directement de ces deux leviers. Les travaux de l’Inra sont essentiels et on note que le plan de travail de l’institut est déjà pleinement ODD-compatible. Je voudrais aussi citer la mobilisation de l’enseignement agricole supérieur, avec Agrocampus Ouest à Rennes et l’ENGEES de Strasbourg, qui se sont lancés dans la démarche exigeante de la labellisation DD-RS. Bien d’autres exemples doivent exister et c’est l’ensemble du réseau de l’enseignement agricole qui constitue pour le ministère un atout majeur. Beaucoup de choses se font. Il ne s’agit pas de tout réinventer, mais de s’appuyer sur les bonnes pratiques qui existent déjà. La dynamique internationale induite par les ODD permet d’aller plus loin. »