20 décembre 2019 Dossier de presse

Phytosanitaires - Mieux protéger les riverains : un nouveau dispositif à partir du 1er janvier 2020

Engagée depuis plusieurs années dans une politique volontariste de réduction de la dépendance aux produits phytosanitaires et de leurs impacts, la France se dotera au 1er janvier 2020 de mesures complémentaires pour la protection des populations riveraines de zones de traitement des cultures agricoles.
S’appuyant sur les recommandations scientifiques de l’Anses, et au terme d’une concertation avec l’ensemble des acteurs, le Gouvernement rend obligatoire l’instauration de distances de sécurité entre les zones de traitement et les habitations.
Les textes réglementaires seront publiés d’ici la fin de l’année. Avec ce dispositif, la France devient l'un des premiers pays européens à se doter d’un cadre national pour la protection des riverains des cultures agricoles.

Des distances de sécurité à respecter par les agriculteurs et autres utilisateurs de produits phytosanitaires

Des distances de sécurité seront à respecter autour des lieux d’habitation par les agriculteurs lors du traitement des cultures.
Ces distances s’appuient sur les préconisations scientifiques et indépendantes formulées par l’Anses dans son avis du 14 juin 2019 :

  • Pour les substances les plus préoccupantes : 20 mètres non réductibles ;
  • Pour les autres produits phytosanitaires, en dehors des produits de biocontrôle (produits naturels), des substances de base et des produits à faible risque : 10 mètres pour les cultures hautes (viticulture, arboriculture notamment) et 5 mètres pour les autres cultures ; ces distances sont réductibles dans le cadre des chartes (voir infra).

Les distances nationales à respecter s’appliquent uniquement en l’absence d’indication spécifique dans les autorisations de mise sur le marché (AMM) des produits phytosanitaires délivrées par l’Anses.

Des adaptations possibles sous réserve d'une concertation locale et de la validation des préfets de département

Les distances de sécurité fixées au niveau national de 10 et 5 mètres peuvent faire l’objet d’un aménagement au niveau départemental sous réserve de l’organisation d’une concertation locale et d’une validation, par le préfet, d’une charte d’engagements.
Le processus d’élaboration des chartes doit suivre plusieurs étapes précises.
Les chartes peuvent notamment prévoir une réduction des distances de sécurité sur la base de dispositifs validés scientifiquement. Des matériels existent déjà pour réduire la dérive de pulvérisation (buses à injection d'air, panneaux récupérateurs dans les parcelles de vigne, matérielde traitement dit «confiné», etc.).
Au vu des connaissances disponibles, ces distances peuvent actuellement être réduites jusqu'à 5 mètres pour l’arboriculture et à 3 mètres pour les autres cultures.
Les chartes doivent contenir impérativement :

  • des modalités d’information des résidents ou des personnes présentes ;
  • les distances de sécurité et les mesures apportant des garanties équivalentes définies par l'arrêté concomitant ;
  • des modalités de dialogue et de conciliation entre les utilisateurs et les habitants concernés.

Les chartes peuvent également inclure : des délais de prévenance des résidents ; le recours à des techniques ou moyens de réduction de la dérive ou de l’exposition des résidents ou des personnes présentes ; des bonnes pratiques pour l’application des produits phytopharmaceutiques ; des modalités relatives aux dates ou horaires de traitements les plus adaptés ; des modalités pratiques d’application des distances de sécurité ou de déploiement de mesures antidérives.

Quand l’ensemble du dispositif sera t-il effectif ?

Le décret (règles d’élaboration des chartes) et l’arrêté (distances minimales) entreront en vigueur le 1er janvier 2020. Toutefois, les distances minimales de sécurité prévues par l’arrêté sont applicables à compter du 1er juillet 2020 pour les parcelles déjà emblavées (semées) à la date de publication du texte, hormis pour les substances les plus préoccupantes.

Un accompagnement financier des agriculteurs

Afin d’accompagner les agriculteurs dans la réduction de l’utilisation de produits phytosanitaires, un appel à projets national sera mis en place dès le printemps 2020. Cet appel à projets sera confié à FranceAgriMer avec un budget global de 25 M€. Cette enveloppe permettra ainsi de doubler l'effort national en soutien à ce type d'investissement porté actuellement par les agences de l'eau, le ministère de l'Agriculture et de l’Alimentation via les DRAAF et les conseils régionaux.

Elle viendra ainsi en complément de l’accompagnement financier actuellement mobilisé dans les régions. Les filières viticulture, arboriculture et maraîchage ont été identifiées comme nécessitant un soutien prioritaire de l’État. L'appel à projets vise ainsi à aider ces filières à investir dans des matériels plus performants répondant à des normes techniques supérieures validées par l'IRSTEA.

Le Gouvernement mobilisera dès le début de l’année les acteurs de la recherche et de l’innovation pour faire un état des connaissances et financera les études complémentaires à mettre en place rapidement. Ces données feront l’objet d’une nouvelle analyse par l’Anses.

Renforcement des dispositifs pour les lieux publics, les zones non agricoles et les lieux accueillant des personnes vulnérables

  • Personnes vulnérables

Les ministres chargés de l’environnement, de la santé et de l’agriculture vont demander début 2020 aux préfets d’adapter les arrêtés préfectoraux pris en déclinaison de la loi du 13 octobre 2014 pour renforcer la protection des personnes vulnérables en imposant des mesures plus strictes à proximité des établissements accueillant ces personnes, et en cohérence avec le dispositif « riverains ».

  • Maîtriser l’exposition des habitants des constructions nouvelles

La limitation de l’exposition des riverains aux produits phytopharmaceutiques doit non seulement traiter des situations de proximité existantes en réglementant les épandages en bordure des habitations (c’est l’objet de l’arrêté sur les zones de non traitement) mais il est aussi nécessaire de maîtriser la création de nouvelles situations de proximité. Ainsi, l’installation de nouvelles habitations en bordure de zones d’épandage doit nécessairement prendre en compte le risque d’exposition aux produits phytosanitaires. C’est pourquoi de nouvelles dispositions en matière d’urbanisme sont à l’étude afin de mettre rapidement en oeuvre un mécanisme qui limite l’exposition des habitants des nouvelles constructions.

  • Protéger les citoyens dans l’ensemble des lieux de vie

(extension des dispositions de la loi n° 2014-110 du 6 février 2014 visant à mieux encadrer l'utilisation des produits phytosanitaires sur le territoire national dite loi Labbé) Dans la continuité de l’arrêté instaurant des zones de non traitement à proximité des habitations, il convient de compléter les dispositions actuelles afin d’interdire l’utilisation des produits phytosanitaires dans les autres lieux ouverts ou accessibles au public, en particulier les copropriétés et les espaces privés accessibles au public. Le gouvernement se rapprochera rapidement des parties prenantes pour organiser une concertation sur ces nouvelles dispositions, afin notamment de déterminer des délais d’entrée en vigueur appropriés.

Expertise indépendante et processus de consultation

Le nouveau dispositif est le fruit d’un travail d’analyse et de concertation lancé au printemps dernier par le Gouvernement. Soucieux de disposer d’une analyse scientifique indépendante pour mener ses travaux, le Gouvernement a sollicité l’appui de l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) sur les mesures de protection des riverains à mettre en place lors de l’utilisation de produits phytosanitaires. L’agence sanitaire a publié son avis le 14 juin dernier et formulé un certain nombre de recommandations sur les distances de sécurité à respecter entre les zones de traitement et les habitations.
Ces préconisations ont été intégrées dans deux projets de textes réglementaires (décret et arrêté) puis soumis à la consultation du public du 9 septembre au 4 octobre 2019 par Élisabeth Borne, ministre de la Transition écologique et solidaire, Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la Santé, et Didier Guillaume, ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation.
53 674 contributions ont été reçues. De façon générale, l’ensemble des contributions illustre l’existence au sein de la population de positions très contrastées sur la question de l’utilisation des produits phytosanitaires et de la mise en place de zones de non-traitement aux abords des habitations. Une part importante des participants ont exprimé de fortes inquiétudes sur l’incidence de ces produits sur la santé, mais également sur l’avenir de la profession agricole.
Le dispositif retenu par le Gouvernement est issu de ce processus.

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