16 juin 2025 Publication

Comment concilier éthique, agriculture et agroalimentaire ?

  • Barbara BOUR-DESPREZ
  • Marie-Lise MOLINIER

Le CGAAER a été chargé d’appréhender les enjeux éthiques propres aux secteurs agricole et agroalimentaire. La prise en compte de l’éthique dans les secteurs de l’agriculture et de l’agroalimentaire s’améliore, même si des progrès sont encore à réaliser.

Rapport de mission de conseil n°23062

Février 2024

Enjeux

La conciliation des différentes exigences auxquelles sont soumis les secteurs agricole et agroalimentaire sous-tend de nombreuses questions ayant trait à l’équilibre économique, à la faisabilité technique des transitions et aux réponses aux aspirations de la société civile et des autres acteurs, dont une part revêt une dimension éthique. Une mission de conseil a été chargée d’appréhender ces enjeux éthiques et leur application pratique pour les acteurs économiques, les consommateurs et, plus largement, l’ensemble de la société.

Méthodologie

Afin d’étayer les réponses aux questions soulevées, la mission a conduit sa réflexion sur la base d’analyses documentaires, de participation à des colloques et séminaires et d’audition de plus de 50 représentants tant de la recherche, de la profession agricole, de l’industrie agroalimentaire et de la distribution, que des consommateurs, de l’administration et de la société civile.

Résumé

La prise en compte de l’éthique n’est pas nouvelle dans les secteurs de l’agriculture et de l’alimentation mais sa nécessité s’est progressivement renforcée au fil du temps, en particulier depuis les dernières décennies du XXème siècle. Pour toutes les parties prenantes, des chercheurs jusqu’aux citoyens, en passant par les producteurs, les acteurs des industries agroalimentaires, les grossistes, les distributeurs, les consommateurs, mais aussi les représentants des administrations et les élus, elle relève d’abord d’une conscience de leur responsabilité vis-à-vis du développement durable. Cela s’apparente à une recherche de sens pour consommer mieux et assurer un bien-être accru pour tous. La transparence et la sincérité des informations données sont désormais essentielles. Chaque citoyen se sent concerné, mais aussi chaque entreprise. Les entreprises, dans leur ensemble, le manifestent à travers la responsabilité sociétale des entreprises et des organisations, qui se développe et devient un outil de management et d’évolution. Les autorités publiques nationales et européennes donnent l’impulsion ou accompagnent des évolutions au travers des multiples stratégies et politiques mises en œuvre. La mission a ainsi pu constater que les exigences environnementales et sociales, ainsi que les attentes éthiques de la société, sont prises en considération, même si des progrès significatifs restent encore à réaliser. Dans les domaines agricole et alimentaire, l’éthique apparait comme un ferment des transitions, malgré les difficultés et les controverses auxquelles elle donne lieu entre les parties. Celles-ci concernent notamment le rythme auquel les évolutions sont à conduire et l’articulation entre des mesures de temps long et de temps court appliquées aux politiques agricoles et aux stratégies des opérateurs de la chaîne alimentaire.

La nécessité de changer les systèmes et les pratiques agricoles, ainsi que les systèmes alimentaires n’est globalement pas contestée par les milieux agricoles et alimentaires. Cependant, elle fait face à plusieurs obstacles : manque de cohérence et de stabilité des politiques et stratégies, difficultés à faire prendre conscience de la complexité des écosystèmes, rentabilité des entreprises et retour sur investissements non assurés, coût des transitions difficile à chiffrer, freins psychologiques nourris par un contexte général d’incertitudes et de risques qui décourage, controverses avec la société civile qui doute et manque d’informations fiables sur les réalités des mutations entreprises et sur le pas de temps réellement nécessaire.

Des perspectives claires sont attendues pour établir un juste équilibre entre les attentes de la société civile et une économie agricole et alimentaire performante assurant la souveraineté alimentaire. Dans ce contexte, six recommandations sont formulées ayant trait au rôle du ministère chargé de l’agriculture pour promouvoir l’éthique auprès des secteurs agricole et agroalimentaire, au développement de la responsabilité sociétale et des lieux de recherche action, à la formation continue, au financement de transitions éthiques, à la communication (information et étiquetage).

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