19 mai 2011 Info +

Notes et études socio-économiques n° 34

Ce nouveau numéro de Notes et Études Socio-Économiques traite des politiques agricoles. Question d’actualité s’il en est alors que l’avenir proche de notre politique agricole commune est actuellement en débat (PAC 2013). Question pérenne et de fond également, au-delà des ajustements conjoncturels, car les soubresauts de l’économie agricole mondiale ces dernières années (crise alimentaire de 2007-2008 puis crise financière de 2008-2009) ont remis au cœur du débat des questions parfois délaissées ces dernières décennies car jugées mineures ou déjà tranchées.

Les différents articles de ce numéro ainsi que le débat traitent tous, selon des approches différentes (théorie économique, analyse comparée, prospective, etc.) de l’actualité de certains de ces questionnements pourtant anciens mais qu’il est toujours pertinent de revisiter au regard des dernières évolutions ou de l’acquisition de nouvelles connaissances.

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Sommaire :

Le premier article, de Vincent Chatellier, retrace l’histoire récente de la politique agricole commune, ses évolutions et ses mécanismes, rappelant les raisons que l’on peut avancer en faveur d’une intervention publique en agriculture. Il explique ainsi que les finalités d’une politique agricole (sécurité sanitaire des aliments, sécurité des approvisionnements, respect de l’environnement, vitalité des territoires), militent pour son ajustement, non pour son renoncement.

Le deuxième article nous amène un peu plus loin, aux frontières de l’Europe politique à 27, en Ukraine, pour étudier les dynamiques concurrentes et complémentaires de deux types d’exploitations : les grandes entreprises, présentées comme le fer de lance de la performance économique agricole ukrainienne, et les micro-structures d’à peine quelques hectares, qui représentent l’immense majorité des exploitations de ce pays. Comme souvent, les résultats en matière de performance comparée ne sont pas ceux que l’on croit.

L’article de Laurence Roudart ouvre encore un peu plus notre horizon spatial et temporel en interrogeant le présupposé, lui aussi couramment admis, d’une rareté alarmante des terres. En comparant les résultats fournis par trois bases de données (FAOStat, GAEZ et SAGE), l’étude montre que les terres cultivées sont encore loin d’occuper l’ensemble des espaces aptes aux cultures pluviales. La conclusion prospective est plutôt optimiste : les terres seront disponibles, demain, pour nourrir les hommes et même fournir la filière des biocarburants tout en respectant zones protégées et surfaces forestières. Demeure tout de même la question la plus difficile : comment les mobiliser efficacement ?

Les résumés des articles :

Vincent CHATELLIER

Cet article propose une réflexion synthétique et prospective sur les mécanismes européens de régulation des marchés agricoles. Il s’inscrit dans la perspective des débats engagés sur l’avenir de la Politique agricole commune (PAC) pour l’après 2013. Dans une première partie, il rappelle tout d’abord que les mécanismes de régulation utilisés au sein de la PAC ont été profondément modifiés au fil des réformes successives, d’une part, pour laisser une plus grande part aux marchés dans l’orientation de la production et, d’autre part, pour les rendre plus compatibles avec les règles multilatérales arrêtées dans le cadre de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Il précise ensuite les principales raisons qui justifient l’existence d’une intervention publique ambitieuse dans ce secteur économique si singulier. Dans une seconde partie, cet article dresse un bilan et propose quelques pistes d’avenir pour les principaux mécanismes de régulation qui fondent la PAC, à savoir les droits de douane, les soutiens aux exportations, le régime d’intervention, les outils de gestion des risques, les instruments de contrôle de l’offre et les aides directes allouées aux agriculteurs.

Clément Jaubertie, Lénaïc Pardon, Hubert Cochet et Robert Levesque

L’agriculture ukrainienne est caractérisée par une très grande hétérogénéité des structures de production et un caractère dual prononcé : d’un côté, les très vastes exploitations de plusieurs milliers d’hectares en grandes cultures qui prennent en location un grand nombre de parcelles (de petite dimension mais réunies en blocs de grande taille) auprès des bénéficiaires de la réforme agraire des années quatre-vingt-dix et, de l’autre, des exploitations familiales de beaucoup plus petite taille parmi lesquelles figurent notamment, à côté d’un petit nombre d’exploitations de quelques dizaines ou centaines d’hectares, une multitude de micro-exploitations (entre 4 et 5 millions à l’échelle du pays) réduites à l’exploitation d’un lopin de moins d’un hectare. Bien que ce dernier secteur ne soit pas considéré par les pouvoirs publics, au-delà de son rôle d’amortisseur social en temps de crise, comme capable de se poser en véritable secteur économique à part entière, il fournirait aujourd’hui une part importante de la production nationale (notamment lait, viande porcine, volaille, pommes de terre et maraîchage). A partir d’une étude détaillée des différents systèmes de production en présence dans deux régions contrastées du pays, cet article se propose de comparer leurs résultats technico-économiques et de réfléchir aux perspectives d’avenir de cette agriculture duale. On montrera en particulier comment une politique foncière repensée, notamment au travers de la régulation de l’accès au foncier, pourrait faire de cette « petite » agriculture un secteur économique des plus dynamiques.

Laurence ROUDART

Cet article analyse trois bases de données relatives à l’étendue des terres à usage agricole, que cet usage soit effectif ou potentiel, dans le monde et dans les grandes régions : il s’agit des bases FAOSTAT, de l’étude GAEZ et du SAGE, cette dernière base étant reprise dans celle de GTAP. Malgré leurs différences et leurs incertitudes inévitables, ces bases indiquent que les superficies de terres utilisables en culture pluviale (sans besoin d’irriguer) et non encore cultivées sont très étendues à l’échelle du monde, de plusieurs grandes régions et de nombreux pays, en particulier en Amérique du Sud et en Afrique sub-saharienne. En revanche, cette ressource apparaît rare, voire épuisée, au Moyen-Orient et en Asie. Le développement de l’irrigation permettrait d’étendre les superficies cultivables en céréales dans plusieurs régions où cette ressource est rare, notamment en Asie centrale et au Moyen-Orient. Le réchauffement climatique entraînerait probablement un accroissement, modeste, des superficies cultivables du monde, mais une diminution dans les pays en développement, notamment en Asie du Sud et du Sud-Est où cette ressource est déjà rare. A l’échelle du monde, les superficies des terres utilisables en culture pluviale sont largement supérieures aux superficies nécessaires pour assurer tout à la fois des conditions de sécurité alimentaire satisfaisantes pour l’ensemble de l’humanité et un certain développement des cultures pour les agrocarburants. Cette conclusion reste vraie même en se plaçant dans l’hypothèse d’une très faible croissance des rendements des cultures, selon un scénario de révolution doublement verte durable, et même en excluant de la mise en culture toutes les forêts et toutes les zones actuellement protégées. La valorisation durable des ces ressources en terres cultivables requiert des politiques publiques appropriées de prix agricoles, d’accès à la terre et de recherche-développement orientées vers les besoins et les possibilités des producteurs pauvres.

Frédéric Courleux, Jean-Marc Boussard,
Jean-Christophe Bureau et Stéphane Le Moing

Débat

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