12 mai 2022 Publication

La forêt usagère de la Teste de Buch en Gironde

  • Françoise Lavarde

Une mission interministérielle a été chargée d’étudier la possibilité de concilier droit de propriété et droit d’usage dans le massif forestier de la Teste de Buch en Gironde

Bandeau de la lettre du CGAAER d'avril mai 2022

Françoise Lavarde

Rapport de mission interministérielle de conseil n°21092

Janvier 2022

Enjeux

La forêt usagère (FU) de la Teste de Buch en Gironde constitue une exception dans le paysage forestier français, en ce qu’elle semble être la seule forêt privée grevée de droits d’usage fondés en titre par une série de « baillettes et transactions » remontant, pour les plus anciennes, au début du XVème siècle.

L’avis favorable sous réserve émis fin 2020 par la commission départementale de la nature, des paysages et des sites de Gironde, sur un plan simple de gestion (PSG), déposé par un propriétaire de la FU auprès du centre régional de la propriété forestière (CRPF) de Nouvelle Aquitaine a suscité une vive réaction de certains acteurs locaux, notamment des usagers, qui y voyaient une atteinte à leurs droits.

La mission interministérielle composée du CGEDD et du CGAAER avait pour principal objet d’examiner le cadre juridique opposable aux propriétaires et aux bénéficiaires du droit d’usage et de proposer un cadre de concertation.

Méthodologie

La mission était composée de Bruno CINOTTI du CGEDD et de Françoise LAVARDE du CGAAER. Elle s’est déroulée d’octobre 2021 à janvier 2022.

Après avoir procédé à une analyse approfondie des baillettes et transactions et de l’abondante jurisprudence des tribunaux judiciaires et administratifs de Bordeaux, la mission a réalisé un déplacement sur site et auditionné une cinquantaine d’acteurs locaux afin de mieux comprendre les fondements des positions de chacun.

Résumé

Développée depuis près de deux mille ans sur un relief de dunes anciennes, protégée des vents dominants par la dune du Pilat, la forêt usagère de la Teste de Buch se caractérise par un écosystème forestier très original constitué par une pineraie-chênaie irrégulière qui a fait l’objet d’une gestion jardinée séculaire en lien avec une valorisation des pins maritimes pour la production de résine. La FU constitue donc au plan local un patrimoine forestier et culturel, dernière relique de l’activité ancestrale du gemmage. Ses spécificités ont d’ailleurs été reconnues et prises en compte au travers des dispositions de protection qui s’appliquent : zone Natura 2000, espace boisé classé à conserver, site classé.

Depuis près de six siècles, les habitants de l’ancien captalat de Buch, titulaires d’un droit d’usage concernant le bois mort pour le chauffage, et, sous certaines conditions, le bois d’œuvre pour la construction, et les propriétaires des parcelles, seuls autorisés à récolter de la résine, veillent jalousement sur leurs droits respectifs, ce qui conduit régulièrement à des périodes de tensions accrues. L’éventualité de l’approbation d’un PSG et la crainte de l’application en FU de méthodes de gestion sylvicoles similaires à celles appliquées dans le massif landais ont été le facteur déclenchant d’une nouvelle période de tension. Mobilisés, les élus nationaux du secteur ont saisi la ministre chargée de l’environnement à qui il revenait in fine de valider le PSG, du fait que la propriété est incluse dans un site classé au titre de la protection des paysages.

L’analyse approfondie des baillettes et transactions montre que, loin d’être un système archaïque, celles-ci constituent un cadre qui a su évoluer au fil du temps et que les dispositions qui y figurent sont en cohérence avec celles du code forestier avec lequel elles s’articulent sans difficulté. Les échanges avec les différentes parties prenantes ont permis à la mission de bien identifier les points sur lesquels des erreurs d’interprétation s’étaient glissées au fil du temps. Après les avoir explicitées et rectifiées, la mission a formulé sept propositions, les six premières en vue de répondre à des problèmes nécessitant une action à court terme, et la dernière proposant un cadre de réflexion pouvant servir de base à une réflexion commune à toutes parties prenantes pour co-construire l’avenir de la FU.

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