18 décembre 2015 Publication

Évaluation du dispositif « Certiphyto »

  • Bruno Andral
  • Jean-Claude Bessemoulin
  • Sylvie Dutartre

Le CGAAER et son homologue du ministère de l’écologie ont été chargés d’évaluer le dispositif de délivrance du certificat individuel phytopharmaceutique « Certiphyto » mis en œuvre depuis cinq ans pour parvenir à une utilisation des produits phytopharmaceutiques compatible avec le développement durable

Le certificat obligatoire pour utiliser des produits phytosanitaires - ©Agri.53.fr

Rapport de mission interministérielle d’expertise N°13132 CGAAER - CGEDD

Novembre 2014

Mots clés : Évaluation, certiphyto, écophyto, référentiel, certificat, attestation, produits phytopharmaceutiques, formation, habilitation, agrément, organismes formateurs

Enjeux

Le dispositif de délivrance du certificat individuel phytopharmaceutique « Certiphyto » a été mis en œuvre en application de la directive européenne du 21 octobre 2009 instaurant un cadre d’action communautaire pour parvenir à une utilisation des pesticides compatible avec le développement durable. Il s’inscrit dans le cadre de l’axe 4 du plan Écophyto.

Il soumet à agrément de l’État les activités de vente, conseil et application des produits phytopharmaceutiques (PPP). Cet agrément est accordé à l’issue d’un audit réalisé par un organisme certificateur. Les personnes exerçant des fonctions d’encadrement, de vente, d’application ou de conseil, et celles qui utilisent les PPP dans le cadre de leur activité salariée, doivent justifier d’un certificat individuel délivré par les DRAAF.

Ce certificat doit être renouvelé périodiquement. Il est délivré au vu d’un justificatif attestant d’une formation adaptée aux activités professionnelles et aux catégories d’utilisateurs concernées, de la réussite à des tests, assortis éventuellement d’une formation ou d’un diplôme. Les formations et tests sont confiés à des organismes habilités par la DGER à l’échelon national, et par les DRAAF ou à l’échelon régional.

Le CGAAER et le CGEDD ont été chargés de l’évaluation du dispositif « Certiphyto ». Celle-ci a porté sur :
- l’efficience du dispositif en lien avec le plan Écophyto et les politiques agricoles portées par le ministère,
- l’organisation du dispositif,
- le bénéfice apporté aux usagers.

Méthodologie

Après analyse du contexte réglementaire, la mission s'est attachée à l'étude du dispositif certiphyto avant de faire un point sur l'état d'avancement de la démarche. Elle a ensuite relevé les principaux éléments de fragilité du dispositif et établi ses recommandations. Au cours de cette mission, les entretiens menés auprès d'acteurs représentatifs (pouvoirs publics, organisations professionnelles...) ont complété l'étude documentaire.

Résumé

En un laps de temps relativement court (5 ans), le dispositif « Certiphyto » a atteint son objectif quantitatif en « attestant la participation à une formation » de la plupart des opérateurs concernés (environ 354 000 certificats), hors salariés agricoles.

Il a conduit à l’implication des professionnels de l’agriculture et à la sensibilisation des acteurs concernés. Il a fait perdre à l’utilisation des produits phytosanitaires tout caractère « anodin » ou « banal ».

Cependant, des interrogations subsistent. Elles concernent :
- la faiblesse du pilotage financier du dispositif et la difficulté d’appréhender son coût consolidé réel ;
- la complexité du dispositif (nombre des référentiels, absence de passerelles entre ceux-ci, multiplicité des intervenants et des systèmes informatiques, coexistence d’une attestation de formation et du « Certiphyto » lui-même, problème de l’étalement du renouvellement…) ;
- certains aspects juridiques (hétérogénéité du système au niveau européen, délivrance du « Certiphyto » sans évaluation en fin de formation, compatibilité avec la réglementation relative à la formation continue, définition floue du statut d’exploitant agricole qui joue sur la délivrance du « permis professionnel » d’acheter des PPP) ;
- l’efficacité du dispositif pour faire changer les pratiques des utilisateurs, difficile à évaluer faute d’indicateurs pertinents ;
- la qualité de la formation dispensée et la formation des formateurs.

Pour y répondre, la mission a formulé une première série de recommandations :
- préciser certains points juridiques (statut du demandeur de certificat, limitation des possibilités d’achat de pesticides selon les besoins, conformité avec la loi sur la formation professionnelle) ;
- revoir l’organisation financière du dispositif ainsi que les modalités de délivrance du « Certiphyto » ;
- fusionner tout ou partie des outils informatisés, aujourd’hui épars, en un outil unique accessible à l’ensemble des acteurs impliqués dans la gestion du dispositif.

Mais surtout, le « Certiphyto », qui constitue de fait un permis d’acheter des produits dangereux, doit dépasser son statut actuel d’attestation de suivi de formation et viser un objectif de modification de pratiques, seul à même de réduire l’usage et les impacts des pesticides. Des recommandations portant sur la diminution du nombre de référentiels de certification l’amélioration du dispositif de formation (à davantage axer sur la pratique et sur l’échange d’expériences), ainsi que sur le contrôle et l’habilitation des organismes de formation ont également été faites.

Le « Certiphyto » deviendrait ainsi un véritable certificat de qualification professionnelle.

Lien vers le rapport


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