La tordeuse grise du mélèze en phase de pullulation
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Suivant son cycle de gradations, les défoliations de la tordeuse grise du mélèze marquent fortement le paysage alpin cette année. Mais ce cycle serait-il en train de changer?
La tordeuse grise du mélèze, Zeiraphera diniana, est une chenille qui, une fois par décennie, fait parler d’elle tant les dégâts qu’elle occasionne sont spectaculaires dans les mélézins alpins situés aux altitudes 1800 à 2000 m. Le dernière gradation débutée il y a deux ans, a atteint un niveau d’attaques qui a marqué le paysage alpin. Les dégâts ont toutefois baissé en intensité durant les dernières décennies, depuis le début des années 1980.
La tordeuse grise
La tordeuse grise du mélèze est présente dans toute l'Europe moyenne et septentrionale et jusqu'en Sibérie orientale.
Les papillons volent au crépuscule de fin juillet à septembre. La femelle dépose ses oeufs sous du lichen présent sur les branches ou les troncs des mélèzes. Ces oeufs passent l'hiver sous cette forme qui résiste aux températures extrêmes de la haute montagne.
Au printemps, l'éclosion des oeufs libère de jeunes chenilles qui pénètrent dans les bourgeons puis forment un fourreau d'aiguilles très caractéristique avec la rosette.
Au 4ème et 5ème stade, les chenilles sortent et consomment les aiguilles en quantité laissant derrière elles déjections et soies. Elles se laisseront ensuite tomber au sol, retenues par les fils de soie, pour effectuer leur nymphose.
Un cycle régulier
Connu depuis le Moyen-âge, ce défoliateur fait l’objet d’une surveillance de la part des forestiers et des scientifiques. Des études de dynamique des populations, confirmées par des analyses dendrochonologiques, ont permis de déterminer que le cycle des gradations (pullulations des populations) est d’environ 10 ans. Au maximum de la pullulation, on peut compter 60 à 100 pousses infestées par arbres de 400 à 800 chenilles par kilogramme de rameaux de mélèze, soit plus de 25 000 chenilles par arbre !
La tordeuse change ses habitudes
Depuis les années 1980, les populations de tordeuse et les dégâts constatés dans les secteurs habituellement très touchés, entre 1800 et 2000 m d’altitude, sont en forte baisse. Pour mieux comprendre ce phénomène, des recherches sont en cours à l’INRA d’Orléans et au Département de Santé des Forêts. Parmi les pistes envisagées : la modification de la synchronisation phénologique. Ce phénomène permet à la jeune chenille d’émerger au moment du débourrement des mélèzes. Cette coïncidence était, jusque là, effective à une altitude proche de 1850 m. A partir des années 2000, à cette altitude, les pullulations restent cycliques mais leur niveau s’est effondré.
Un décalage du moment du débourrement serait à l’origine de la baisse des populations aux altitudes concernées et d’une remontée en altitude de l’insecte. L’étude de la phénologie du débourrement du mélèze et de l’éclosion des oeufs a été menée par l’INRA d’Orléans entre le cycle de 1970-1980 et le cycle actuel, sur un transect altitudinal de 1300 à 2300 m dans une vallée du Briançonnais. Le déplacement des insectes en altitude a été confirmé.