Jade Richard, éleveuse en devenir : « Il faut croire en ses rêves »

Pendant des années, quand Jade Richard arpentait avec son troupeau les pentes du Mercantour ou d’autres vallées alpines, elle mûrissait un rêve : celui de pouvoir s’installer à son compte en tant qu’éleveuse. Mais elle manquait de « confiance en soi », sans compter l’inquiétude de devoir se former à la gestion d'entreprise : « J’avais peur des maths, de la compta… Moi qui ai arrêté l’école tôt, je me voyais mal y retourner. Et puis j’aimais être salariée et pouvoir bouger souvent. » Mais ce rêve ne la quitte pas, celui « d’être son propre patron, d’acquérir son propre troupeau et de le mener comme on le souhaite, de pouvoir poser mes initiales sur la laine… »

Elle a enfin franchi le pas, encouragée par ses proches : elle suit durant l’année scolaire 2024-2025 le Brevet professionnel Responsable d’entreprise agricole (BPREA) du lycée de Carmejane, dans les Alpes de Haute-Provence. Elle a choisi, logiquement, la spécialisation « ovins allaitants », pour l'élevage de brebis destiné à la production de viande. D’autres élèves de la formation ont opté pour l’élevage laitier, le maraîchage, les grandes cultures… Chacun est arrivé avec son propre projet d’installation, que l’enseignement va permettre d’affiner, de réorienter, voire de modifier en profondeur.

La formation est adaptée en fonction des antécédents des élèves : « Comme j’ai déjà pas mal d’expérience, que j’ai travaillé chez plusieurs éleveurs, j’ai moins de stages à faire… mais plus de cours de compta », précise-t-elle. Au sein du BPREA, la variété des profils et des projets est une source d’enrichissement : « Tout le monde est différent, l’étudiante la plus âgée a 52 ans, certains veulent faire de la production de laine, de l’agritourisme… On échange beaucoup, on s’entraide. »

« C’est sécurisant d’intégrer une structure existante »

Au départ, Jade imaginait s’installer seule, monter son propre projet. Elle a finalement la possibilité de rejoindre, en 2026, le GAEC de son compagnon et de la sœur de ce dernier, d’abord en tant que salariée, puis en tant qu’associée lorsqu’elle sera prête à s’installer. L’exploitation compte aujourd’hui 600 brebis et 300 hectares menés en bio dans la vallée de la Haute Bléone, dans les Alpes de Haute-Provence. Jade aime l’idée de ne pas se lancer seule : « C’est sécurisant d’intégrer une structure existante avec une valeur économique, une rentabilité. » Elle leur apportera ses compétences pour la gestion et la garde de troupeau, ou encore les agnelages, mais aussi cette habileté, ce qu’en occitan on appelle le « biais », qu’elle a développé avec les bêtes.

L’élargissement du GAEC impliquera des décisions importantes : il faudra faire grossir le troupeau pour augmenter le revenu de l’exploitation, et envisager d’autres sources de revenus : « Agrandir l’atelier d’ovins viande ? Créer une fromagerie, et donc se former à ça ? On en décidera le moment venu. » Avant d’en arriver là, Jade Richard doit en terminer avec la formation, obtenir son diplôme. L’été 2025, elle le passera en alpage avec un troupeau, près de son village natal : sa dernière saison en tant que bergère, avant de se lancer dans la suite.