22 novembre 2024 Publication

Prévenir et maîtriser les risques liés à la présence de pesticides et de leurs métabolites dans l'eau destinée à la consommation humaine

  • Alain JOLY (CGAAER)
  • Maryse FOURCADE Valérie GERVAIS et Frédérique SIMON-DELAVELLE (IGAS)
  • Patrick LAVARDE et Adèle VEERABADREN (IGEDD)

Une mission conduite conjointement par l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS), le Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) et l’Inspection générale de l’environnement et du développement durable (IGEDD) a analysé la prévention et la maîtrise des risques liés à la présence de pesticides et de leurs métabolites dans l'eau destinée à la consommation humaine.

Lettre du conseil général de l'alimentation de l'agriculture et des espaces rurauxn° 189 de novembre 2024

Rapport de mission interministérielle de conseil n°23111

Juin 2024

Enjeux

Les responsables de la production et de la distribution de l’eau doivent fournir une eau propre et salubre à partir d’eau brute prélevée dans les ressources souterraines et de surface. Or, le contrôle sanitaire met en évidence la contamination des ressources en eau dans nombre de régions par des métabolites de pesticides à des concentrations supérieures à la limite de qualité. L’enjeu est de baisser ces taux en deçà des seuils réglementaires au niveau de la distribution d‘eau destinée à la consommation humaine (EDCH) dans une logique de principe de précaution pour la protection des populations.

Méthodologie

La mission interministérielle s’est rendue sur les aires d’alimentation de captages du Calvados, de l’Aisne et de la Charente-Maritime où des dépassements de seuils de qualité sont constatés. Elle a auditionné plus de 250 personnes et a étayé ses constats par une enquête auprès des agences régionales de santé.

Résumé

L’usage des pesticides, notamment pour la protection des végétaux, conduit à des rejets chroniques et diffus vers les milieux naturels.

La surveillance de premier niveau, qui incombe aux personnes responsables de la production et de la distribution d’eau (PRPDE), est réalisée de façon hétérogène selon les territoires. Pour la mission, il conviendrait de fixer au niveau national une liste-socle de molécules à rechercher et organiser une collaboration structurée entre les deux laboratoires nationaux de référence afin de réduire la variabilité des mesures. Pour améliorer la surveillance, il faudrait également combiner approche analytique par substance et biosurveillance.

En matière de « pertinence » des métabolites (au sens de la réglementation), la mission conclut qu’il faudrait une méthodologie unique d’évaluation fondée sur les prescriptions les plus protectrices du document-guide Sanco et de la méthode Anses. Il conviendrait aussi de définir des valeurs toxicologiques de référence (VTR) au niveau européen.

S’agissant de l’Anses, une augmentation de la redevance sur les autorisations de mise sur le marché (AMM) renforcerait ses capacités d’étude. Les AMM pourraient, si besoin, après adaptation du droit, intégrer des restrictions, voire des interdictions d’usages adaptées aux aires d’alimentation des captages (AAC).

La mission recommande d’harmoniser l’action des Agences régionales de santé (ARS) par l’adoption de règles communes de gestion des métabolites non pertinents, des non-conformités et des cumuls de substances en dépassement.

La mission a identifié des mesures de réorganisation de la gestion locale des dérogations accordées aux PRPDE et de simplification des actes administratifs.

Elle préconise d’améliorer l’information sur la qualité de l’eau par des mesures tant au niveau national qu’à l’attention des usagers.

La situation des eaux brutes justifie le développement de solutions curatives de plus en plus onéreuses et plus ou moins accessibles aux PRPDE. C’est pourquoi la mission recommande de renforcer le dispositif de financement public du secteur.

Au vu des résultats des mesures préventives mises en œuvre sur les AAC, la mission préconise le développement des zones soumises à contraintes environnementales (ZSCE) et des programmes d’actions allant jusqu’à des mesures obligatoires en cas de dépassement des seuils de qualité.

Enfin, la mission recommande de mieux valoriser l’agriculture biologique, d’améliorer l’attractivité des mesures agro-environnementales et climatiques (MAEC) à enjeu eau, et de renforcer les moyens affectés aux actions locales de réduction de la pression phytosanitaire sur les eaux destinées à la consommation humaine.

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