31 juillet 2025 Publication

Plan de réorientation et/ou de suppression progressive des subventions dommageables à la biodiversité dans le cadre de la Stratégie nationale biodiversité 2030

  • Bruno LOCQUEVILLE
  • Alessandra KIRSCH

Une mission du CGAAER a analysé les dépenses publiques à destination des secteurs de l’agriculture, de la pêche maritime, de l’aquaculture marine et de la forêt au regard de leur impact sur la biodiversité. Parmi celles-ci, elle a tenté de chiffrer le montant des dépenses dommageables à la biodiversité et formulé des propositions de réorientation, en tenant compte du contexte économique des secteurs étudiés et des enjeux de souveraineté.

Bandeau newsletter CGAAER juillet 2025

Rapport de mission de conseil n°24083

Mai 2025

Enjeux

Les stratégies internationales, européenne ou nationale consacrées à la préservation de la biodiversité font toutes de l’identification, et de la suppression ou de la réorientation des subventions dommageables une priorité.

Une précédente mission, confiée à l’inspection générale des finances (IGF) et à l’inspection générale de l’environnement et du développement durable (IGEDD), avait qualifié de dommageables 10 Md€ de dépenses publiques, dont 7 Md€ d’aides agricoles.
L’objet de la présente mission, initialement confiée conjointement aux deux inspections ci-dessus et au CGAAER, était essentiellement de revisiter ce chiffrage.

Compte tenu d’un désaccord entre les missionnés portant sur la méthode, deux rapports distincts ont finalement été produits. Le rapport dont il s’agit ici est celui du CGAAER.

Méthodologie

Après avoir entendu différentes catégories d’acteurs concernés et consulté l’abondante littérature consacrée au sujet, les missionnés ont passé en revue ligne à ligne l’ensemble des dépenses publiques, de toute nature et de toute origine, consacrées aux secteurs de l’agriculture, de la pêche maritime, de l’aquaculture marine et de la forêt.
Ont été qualifiées de dommageables les dépenses incitant, en référence à un scénario sans intervention publique, à adopter des comportements eux-mêmes dommageables.

Résumé

La mission du CGAAER a identifié peu de subventions dommageables au regard des montants analysés (1,3 Md€ sur 33,3 Md€).

Par secteur, les principales conclusions sont les suivantes :

  • agriculture : le secteur est fortement dépendant des aides, dont la majeure partie est un soutien direct au revenu. L’essentiel des subventions agricoles de la PAC est désormais soumis à la conditionnalité et la plupart des incitations dommageables à la biodiversité ont été supprimées au fil des réformes. Seuls l’avantage fiscal pour achat de carburants et combustibles fossiles ainsi que quelques aides couplées sont identifiés comme dommageables et toute évolution les concernant est délicate. Cependant, la biodiversité continue à se dégrader sur les terres agricoles et le développement des pratiques vertueuses doit continuer à être encouragé. Les missionnés proposent de reconsidérer les assouplissements récemment apportés à la conditionnalité, de créer un niveau supplémentaire à l’éco-régime et de nouveaux bonus et, enfin, de réorienter voire d’augmenter les moyens dédiés à certains dispositifs ;
  • pêche et aquaculture : il s’agit ici aussi, surtout pour la pêche, de secteurs évoluant dans une concurrence internationale et soutenus par les pouvoirs publics. Le principal levier identifié est constitué par les allègements de taxes en matière de prix d’achat du carburant. D’autre part, une concertation avec le secteur est nécessaire. Elle doit s’inscrire dans une réflexion européenne et internationale afin de définir une stratégie de réduction progressive de la pression liée au chalutage de fond dans les aires marines protégées ;
  • forêt : le seul poste de dépense identifié comme dommageable est l’allègement fiscal pour l’achat de carburants pour travaux forestiers. Comme pour le secteur agricole, cet allègement pourrait théoriquement être supprimé mais les missionnés ne formulent pas de préconisations le concernant, si ce n’est d’aborder le cas échéant le sujet avec prudence, compte tenu de sa sensibilité.

Si la remise en cause des quelques aides qualifiées de dommageables ne peut être envisagée qu’avec circonspection, une amélioration de la prise en considération de la biodiversité doit être envisagée en contrepartie du soutien public accordé aux secteurs étudiés. Une telle évolution devrait tenir compte des atteintes potentielles ou avérées que représentent les pratiques mises en œuvre et du préjudice irrémédiable que ne manquerait pas de lui causer la poursuite au même rythme de la dégradation observée.