03 septembre 2025 Publication

De la pertinence de développer les banques d’antigènes en santé animale en anticipation des émergences sanitaires

  • Dominique CHABANET
  • Pascale PARISOT
  • avec l’appui de Loïc EVAIN

Anticiper les maladies animales susceptibles d’arriver en France dépend-il de l’existence de banques d’antigènes ? Les banques biologiques pour le diagnostic et la vaccination sont diverses et leur existence dépend d’un équilibre économique qui impose d’adopter des stratégies vaccinales stables partagées et acceptées par les parties prenantes. Elles nécessitent un accès aux pathogènes circulant dans le monde et une gouvernance agile et compétente

Rapport de mission de conseil n°24077

Juin 2025

Enjeux

L’anticipation des nombreuses introductions de maladies animales sur le territoire français, causées notamment par l’acclimatation désormais possible de leurs vecteurs exotiques, nécessite de repenser notre rapport à la vaccination. L’évolution des technologies a ouvert d’importantes possibilités et notre capacité à mobiliser les données pour une analyse coûts-bénéfices d’une vaccination invite à changer de paradigme. L’accès aux pathogènes circulant dans le monde et aux données sur leurs impacts sanitaire et économique est crucial. Par ailleurs, la production de kits diagnostics et de vaccins repose sur une stratégie vaccinale stable, portée par une gouvernance agile.

Méthodologie

Des entretiens conduits avec des scientifiques et des industriels du diagnostic et du vaccin ont porté sur l’identification des facteurs de la chaîne de décision qui permettent la production rapide et en quantité suffisante de kits de diagnostic ou de vaccins. Les obstacles réglementaires, notamment d’accès aux souches circulant dans le monde ont été étudiés ; les facteurs favorables à la mise en place de stratégies vaccinales stables ont fait l’objet d’échanges avec les parties prenantes.

Résumé

Les crises sanitaires successives dans le monde animal et les appels à leur anticipation, notamment par la vaccination, questionnent la pertinence de développer les banques d’antigènes pour plus de réactivité. C’est d’ailleurs un sujet de discussion dans le cadre des Assises du sanitaire initiées en janvier 2025.

La mission formule six recommandations visant à permettre la définition de stratégies vaccinales stables, indispensables à la mise au point des outils et à la mobilisation des chaînes de production des kits de diagnostic et des vaccins souhaités. En premier lieu, une stratégie vaccinale doit être proposée au Conseil National d’Orientation de la Politique Sanitaire Animale et Végétale (CNOPSAV) par un comité de stratégie vaccinale restreint et compétent sur la maladie concernée et, pour être stable dans le temps, reposer sur une analyse des coûts et bénéfices sanitaires, économiques et sociaux.

L’accès aux pathogènes circulant dans le monde et les moyens consacrés à la recherche doivent permettre d’exploiter les promesses des nouvelles technologies supports de la vaccination, notamment l’accès à des animaleries confinées permettant l’hébergement des différentes espèces de rente. Une augmentation du nombre de projets de recherche vétérinaires sur les mécanismes immunitaires et les vaccins est nécessaire. L’identification des meilleurs immunogènes et les travaux visant à développer la capacité à les coupler avec des « plateformes vaccinales », supports (génomiques, protéiques…) d’insertion d’antigènes, doivent reposer sur des projets partenariaux associant les équipes internationales compétentes. Le caractère zoonotique de nombre de maladies animales rend indispensable le partenariat avec les équipes de santé humaine, conformément à l’approche « Une seule santé ». La Commission européenne doit être mandatée pour donner plus de fluidité à la mise en œuvre des protocoles de Nagoya sur les échanges internationaux de matériels biologiques et de Cali sur les échanges de données de génotypages. Dans l’attente, le réseau des ambassades de France peut être facilitateur.

La capacité à mettre en œuvre, en temps utile, une vaccination massive sur les animaux cibles suppose en outre de se mettre d’accord au niveau national sur des responsabilités partagées, des mécanismes de financement assumés et une communication univoque.

Enfin, pour bâtir un dispositif solide et durable, et justifier d’autant plus le recours à des banques biologiques, la mission recommande que des prophylaxies (diagnostic et/ou vaccination) annuelles/par « bande » soient (re)mises en place, avec une évolution régulière des valences vaccinales.

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