21 janvier 2022 Publication

Valorisation de la venaison

  • Didier Guériaux et Michel Reffay

Le CGAAER a été chargé de conduire une mission sur les atouts et les faiblesses des filières de viande de gibier et d’identifier leurs perspectives d’amélioration.

Bandeau de la lettre du CGAAER de janvier 2022
Sanglier nez dans la terre
agriculture.gouv.fr

Rapport de mission d’expertise et de conseil n° 21032

Octobre 2021

Mots-clés : viande, gibier, chasse, valorisation, filière, hygiène de la viande

Enjeux

Les chasseurs sont les principaux consommateurs du gibier qu’ils prélèvent, mais certaines chasses le commercialisent auprès de distributeurs locaux ou d’ateliers de traitement, dans un contexte où la majeure partie de la venaison accessible au grand public en France serait importée.

L‘accroissement des tableaux de chasse, notamment en grand gibier, nécessite une réflexion sur l’amélioration de la diffusion de la venaison issue des territoires nationaux, afin d’anticiper une inexorable saturation de l’autoconsommation. Cette réflexion passe par l’identification des blocages culturels, institutionnels, organisationnels et sanitaires, et par les moyens de s’en affranchir pour garantir un avenir à la chasse en France.

Méthodologie

Les acteurs du monde de la chasse, ceux du traitement et de la transformation de la venaison, et les administrations concernées ont été consultés. Plusieurs porteurs de projet de valorisation de la venaison ont pu aussi être approchés pour identifier la diversité des difficultés rencontrées.

La rareté des données disponibles a nécessité un travail de reconstitution des informations pour caractériser les volumes de viande de gibier circulant en France.

Les réglementations sanitaires française et européenne, et les opportunités et faiblesses de la filière, ont fait l’objet d’une analyse avancée pour préconiser des évolutions possibles.

Résumé

Les venaisons bénéficient d’une réelle notoriété auprès du grand public, même si elles ne représentent que de l’ordre de 1 % des viandes consommées en France. L’organisation des circuits commerciaux répond aux contraintes sanitaires imposées par les réglementations européenne et française : l’autoconsommation apparente du gibier par les chasseurs est très fréquente et les circuits courts peu développés. Pour autant une porosité qualifiée de « zone grise » entre ces deux pratiques de diffusion du gibier a été identifiée.

Le circuit de commercialisation long est dominé par un nombre restreint d’acteurs de l’aval exerçant de fait des contraintes de volume, de prix et de géographie.

La mission propose de mieux gérer la production primaire de gibier et d’anticiper les tableaux de chasse importants. À ces fins, l’élaboration d’un guide de bonnes pratiques d’hygiène de la venaison est indispensable, tout comme le déploiement de chambres froides au sein des territoires de chasse

Par ailleurs, l’organisation fédérale de la chasse doit faciliter le passage de contrats avec l’aval pour anticiper le nécessaire écoulement de la venaison, notamment celle issue de chasses conduisant à des prélèvements importants pour lesquels la mission propose une caractérisation.

Au niveau de la commercialisation et de la transformation, la mission, qui a identifié les freins au développement des ateliers de traitement, recommande de dynamiser les circuits courts dans le cadre d’une expérimentation nationale, en invitant les chasses à livrer aux détaillants locaux de grosses pièces de gibier, et non comme jusqu’à présent, des carcasses entières et habillées.

Cependant, ces mesures n’auront un réel impact que si les pratiques de consommation de la venaison évoluent. Face à une consommation faible, saisonnée et réservée à des initiés, l’interprofession devra engager une communication auprès du grand public. Cette communication doit être basée sur l’appellation « gibier » et sur des indications géographiques d’origine, en prolongement de projets d’ateliers à vocation territoriale. L’interdiction progressive du plomb dans les munitions destinées au grand gibier s’inscrit dans la logique de prévenir toute défiance vis-à-vis de la viande de ces gibiers.

Parmi les risques et opportunités identifiés, la mission insiste sur la relativité de la question du prix du gibier. Le monde de la chasse doit plutôt faire prévaloir la question de l’éthique, dont la valorisation alimentaire, loin devant toute considération économique.

Il est indispensable de renforcer une filière aujourd’hui naissante. InterProchasse doit s’élargir aux professionnels de l’aval et porter une ambition plus offensive. Ainsi pourra-t-elle régulièrement publier les chiffres caractérisant cette activité, chiffres aujourd’hui rares et dispersés.

La mission a observé un certain embarras des opérateurs, désorientés face à une sphère publique partagée entre des exigences environnementales, d’une part, et de sécurité alimentaire, d’autre part.

Il s’agit bien de mettre en œuvre une véritable organisation de filière qui doit progresser sur différents plans pour permettre une circulation plus fluide de la venaison en France et garantir le respect de l’éthique de la chasse : l’avenir de cette dernière en dépend.

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