05 mai 2022 Publication

Place de la France dans les politiques agricoles en Afrique

  • Laurent Bonneau
  • François Le Gall
  • Hervé Lejeune

Le CGAAER a été chargé d'étudier la place de la France dans les politiques agricoles en Afrique.

Bandeau de la lettre du CGAAER d'avril mai 2022

Rapport de mission de conseil n°19105

Septembre 2021

Mots-clés : Politiques publiques, influence, agriculture, alimentation, sécurité alimentaire, Afrique

Enjeux

La question agricole et alimentaire doit être au cœur de la relation entre la France et l’Afrique. Elle est essentielle et stratégique pour deux raisons : le défi alimentaire lié à la croissance démographique et aux enjeux de l’emploi des jeunes en Afrique, ainsi que la question des interdépendances alimentaires relancée par la pandémie Covid-19.

Le CGAAER a été chargé d'étudier la place de la France dans les politiques agricoles en Afrique.

Méthodologie

Pour apprécier l’aide française en matière agricole, la mission a analysé une importante bibliographie. Faute de pouvoir se rendre sur le terrain, comme prévu, en raison de la crise de la Covid, elle a interrogé de nombreux acteurs en visio-conférence ou en présentiel. Quatre-vingt-dix témoins ont ainsi été entendus.

La mission s’est également intéressée à l’aide publique au développement et à la force de frappe agricole bilatérale française en Afrique, aux interventions dans les domaines de l’enseignement et de la recherche, ainsi qu’à l’ensemble des activités menées spécifiquement par le ministère en Afrique.

Résumé

L’histoire de la coopération agricole française en Afrique est riche et dense. Après les premières indépendances, la coopération agricole française avec l’Afrique a été portée par un dispositif fort et une doctrine inspirée de la colonisation avant de s’aligner progressivement sur l’aide internationale. Elle a été revisitée à l’occasion des ajustements structurels des années 80, perdant ainsi sa spécificité. Elle a obtenu des succès dont certains ont été utilisés et promus par la communauté internationale mais n’a pas suffisamment su défendre auprès des partenaires africains l’originalité de sa position et de son approche.

Le rôle de la France dans les politiques agricoles en Afrique s’est affaibli au cours des vingt dernières années avec une double marginalisation : celle du ministère au sein du dispositif français d’aide au développement et celle de la coopération agricole française au sein de la coopération européenne et internationale. La coopération internationale est devenue très concurrentielle et financiarisée. Les approches macro-économiques ou environnementales y ont été davantage privilégiées que les approches sectorielles. Alors que les destins français et africains sont liés, la France n’a pas pris la mesure des enjeux agricoles et alimentaires du développement du continent africain. Á ces enjeux ne répond aujourd’hui aucune ambition collective. L’action se disperse entre des objectifs divers et une multitude d’acteurs, publics et privés, sans réelle vision, sans pilotage avéré et sans coordination lisible pour contribuer à relever les nombreux défis du continent.

Pour espérer jouer un rôle dans les politiques agricoles et les agricultures africaines, le ministère devra donc porter une nouvelle ambition appuyée sur une forte impulsion politique. Il devra trouver sa place au sein de l’ensemble des acteurs français dans un dispositif plus cohérent et piloté. Il s’agira aussi de reconnecter nos filières économiques agricoles avec l’ensemble de l’écosystème, dont certaines composantes sont souvent très isolées (recherche et enseignement), en redynamisant notre expertise technique et stratégique (MEAE, MAA) et en relançant l’AFD sur les questions cruciales qui hypothèquent la réussite des secteurs agricole et alimentaire en Afrique.

En conséquence, la mission formule sept recommandations. Il convient, tout d’abord, de redonner une vision et une stratégie commune de la France sur les questions de développement agricole et d’alimentation en réconciliant davantage les questions commerciales et l’aide au développement et en articulant mieux l’action des différentes directions d'administration centrale avec les principaux acteurs français de la coopération internationale comme l’AFD ou le CIRAD. Le ministère est également attendu sur sa capacité à composer une équipe « France agricole et alimentaire » pour construire les nouvelles interdépendances agricoles et alimentaires entre la France et l’Afrique. Au niveau opérationnel, il est proposé de mettre en place une « mission Afrique » au sein du ministère qui assurerait l’animation de l’équipe « France agricole et alimentaire », la coordination des actions « Afrique » des différentes directions d'administration centrale et le travail avec l’ensemble des partenaires publics et privés français.

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