04 octobre 2018 Publication

Lutte contre Xylella fastidiosa en Corse

  • Jean-Louis Barjol
  • Michel Larguier

Le CGAAER et le CGEDD ont été chargés d'élaborer une nouvelle stratégie de lutte contre la bactérie Xylella fastidiosa, suite au classement de la Corse en zone d'enrayement.

prefectures-regions.gouv.fr/corse/ Rapport de mission interministérielle de conseil n°17120

Juin 2018

Mots clés : bactérie polyphage, Xylella fastidiosa, Corse, CROPSAV, oliviers, maquis, enrayement, détection précoce

Enjeux

La découverte de la présence de la bactérie Xylella fastidiosa sous-espèce multiplex en Corse en juillet 2015 suscite de vives inquiétudes pour l'avenir de certaines cultures et des milieux naturels, même si, jusqu'à présent, la bactérie n'a pas été identifiée sur un végétal cultivé sur des parcelles agricoles entretenues.

Face à la dispersion géographique des 354 foyers répertoriés dans l’île, essentiellement en milieux naturels et en zone urbaine, il a été décidé de passer d'une stratégie d'éradication à une stratégie d'enrayement pour laquelle le CGAAER et le CGEDD ont été appelés à faire des recommandations.

Méthodologie

La mission était composée d’Odile Stefanini-Meyrignac et Christian Barthod du CGEDD, et de Jean-Louis Barjol et Michel Larguier du CGAAER.

Elle a mené un travail bibliographique et rencontré des chercheurs, des experts et des agents économiques et sociaux aussi bien en Corse que sur le continent. Elle s'est également rendue à Majorque en Espagne et dans les Pouilles en Italie, deux zones d'enrayement de la bactérie.

Résumé

Les scientifiques ont mis en évidence que la présence en Corse de Xylella fastidiosa subsp. multiplex est ancienne et que cette sous-espèce est différente de la sous-espèce pauca, très agressive sur l’olivier, détectée depuis 2013 en Italie et à l'origine de la mise en place du cadre réglementaire européen et de la sous espèce fastidiosa, responsable de la maladie de Pierce sur la vigne.

La mission a entendu les débats sur les méthodes de détection de la bactérie dans l'île. Elle a pris acte que le passage de la Corse en zone d'enrayement signifie que les producteurs devront respecter un certain nombre de mesures dans un environnement destiné à demeurer contaminé par Xylella fastidiosa.

La mission a constaté d'importants besoins de dialogue, de diffusion de l'information scientifique, de recherche appliquée, de surveillance de l'état sanitaire des végétaux et de mesures pour réduire les risques d'introduction de nouvelles souches.
Elle recommande de :

  • mettre en place un conseil scientifique auprès de la préfète de Corse ;
  • créer des groupes de travail techniques au sein du CROPSAV (recherche variétale, bonnes pratiques agricoles, scénarios de détection de nouvelles souches ou de foyers, et nouvelles dispositions réglementaires) ;
  • faire évoluer les méthodes d'analyse et d’échantillonnage des végétaux pour améliorer l'exactitude du diagnostic sur tous les types de végétaux grâce à un dialogue renforcé entre l’ANSES et l’Inra ;
  • orienter le dispositif de surveillance du territoire vers la détection précoce de sous-espèces de Xylella fastidiosa nouvelles pour la Corse et prévoir une articulation entre les surveillances des zones agricoles et naturelles ;
  • renforcer la mise en œuvre pratique des inspections sur les entrées et les sorties de végétaux en Corse ;
  • permettre des dérogations à l'interdiction de plantation des plantes hôtes de Xylella fastidiosa, en lien avec l'abrogation demandée par l'Union européenne de l'arrêté actuel sur les entrées de végétaux en Corse ;
  • renforcer l’information et la sensibilisation des voyageurs et des résidents sur les risques liés aux mouvements de végétaux.

Au-delà du territoire de la Corse, la mission appelle à la vigilance sur :

  • les travaux des chercheurs relatifs à la modélisation de la répartition potentielle de la bactérie en France continentale, notamment pour sa sous espèce agent de la maladie de Pierce pour la vigne ;
  • l'intérêt d’utiliser les insectes vecteurs de la bactérie comme des sentinelles sur des territoires réputés indemnes, une fois que la validation des méthodes analytiques correspondantes seront terminées ;
  • l'examen de la nuisibilité de la sous espèce multiplex sur les végétaux cultivés en zones agricoles, pour mesurer son effet réel en comparaison de l'impact important des mesures communautaires d'éradication (destruction des végétaux hôtes sur trois hectares autour de la plante infectée) ;
  • la mauvaise adaptation de la réglementation communautaire à la prise en compte des espaces naturels, potentiels réservoirs de la bactérie, et parfois difficiles d'accès.

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