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Pascal Xicluna / agriculture.gouv.fr

11 juin 2021 Info +

Semences : foire aux questions

Protection de variétés de semences, progrès génétique, variétés hybrides... Les semences sont sélectionnées pour répondre aux besoins des Hommes et constituent le premier maillon de l’acte de production agricole. Consultez notre foire aux questions sur ce sujet.

1/ Orienter le progrès génétique est-il nécessaire?

Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, les variétés cultivées ont considérablement évolué, que ce soit au niveau de leur rendement ou de leurs caractéristiques « technologiques » (qualité d’huile, panification du blé tendre, taux de protéines…). Ces évolutions sont la résultante d’une politique de l’État visant la modernisation de l’agriculture d’après-guerre. Depuis les années 2000, l’ambition est de s’orienter vers une combinaison de caractéristiques alliant performance agronomique et performance environnementale (résistance aux maladies, réduction des fertilisants, résilience face aux aléas climatiques). Pour obtenir des variétés correspondant à ces profils, des règlements techniques publiés par le ministère chargé de l’Agriculture fixent les critères et les seuils auxquels les variétés candidates à l’inscription au catalogue français doivent satisfaire.

Dans un passé récent, cela a permis de lutter efficacement contre la « rouille du blé » ou contre la rhizomanie de la betterave. Ces nouvelles variétés ne seraient probablement pas arrivées aussi vite à disposition des agriculteurs si le marché était totalement libre de règles d’inscription. Ces objectifs de progrès génétique sont adaptés à toutes les espèces selon leurs problématiques.

2/ Pourquoi certaines variétés de semences sont-elles protégées ?

La création d'une nouvelle variété nécessite environ 10 ans de recherche et de développement, et même jusqu'à 20 ans pour les espèces pérennes de type vigne ou plantes fruitières. En effet, de très nombreux tests et essais de croisements de plantes sont nécessaires avant d'aboutir à une nouvelle variété susceptible de rencontrer un succès commercial.

À l’image des droits d’auteur dans le domaine de la création musicale, la création variétale fait l’objet d’une protection intellectuelle. Elle vise à rémunérer l’obtenteur (le créateur de la variété) pour son travail de création et pour l’investissement pluriannuel qu’il a mené en termes de recherche & développement.

C'est pourquoi il a été mis en place un système international de protection des obtentions végétales : le système de Certificat d'obtention végétale (COV). Le système de COV interdit à quiconque la production et la commercialisation des semences d'une variété protégée sans l’accord express de son propriétaire. Les COV ont une durée maximale de 25 ans ou de 30 ans selon les espèces. Ensuite, les variétés tombent dans le domaine public, leur exploitation commerciale devient libre de droit.

3/ Les semenciers profitent-ils de la création variétale pour breveter et s’accaparer le vivant ?

Tout d’abord, l’inscription d’une variété au catalogue officiel n’implique pas un droit de propriété intellectuelle. Pour obtenir ce dernier, il faut faire une démarche spécifique auprès d’un office européen pour obtenir un Certificat d’obtention végétale (COV). Le COV protège de l’utilisation de la variété par un tiers, sans rétribution au profit de l’obtenteur. Mais à la différence du brevet, la variété peut être librement utilisée (sans contrepartie) par toute personne conduisant des travaux de sélection, ce qui permet de dynamiser la recherche et la diffusion de l’innovation variétale.

La France et l’Union européenne sont fermement attachées au principe de libre accès au vivier de biodiversité que constituent les ressources génétiques. Ainsi, l’usage du brevet pour protéger une plante obtenue par croisement traditionnel ou une variété n’est pas autorisé dans l’Union européenne.

Dans tous les cas, la réglementation concernant les semences ne restreint en aucun cas la valorisation commerciale des produits qui en sont issus à des fins de consommation (fruits, légumes, céréales). Un agriculteur peut librement céder, dans le respect des dispositions générales en matière de consommation, les produits issus des semences qu'il a lui-même multipliées ou qu'il aurait lui-même sélectionnées.

4/ Est-il possible d'utiliser et vendre les semences issues de mes précédentes récoltes ?

Il est tout à fait possible de ré-utiliser pour son propre usage les semences issues de sa propre production. Ces semences de ferme, comme on les appelle, sont le résultat de la multiplication de semences par un agriculteur sur son exploitation. Cette pratique n’est toutefois autorisée que sous certaines conditions :

  • Soit la variété ne fait pas ou plus l’objet d’un Certificat d’obtention végétale (COV, forme de droit de propriété intellectuelle sur les variétés végétales) ;
  • Soit la variété fait l’objet d’un COV et relève d’espèces pour lesquelles un dispositif prévoit une rétribution de l’obtenteur. C’est le cas de la plupart des espèces agricoles (blé, orge, pommes de terre…). La rémunération versée à l'obtenteur est d'un montant moindre que si les semences avaient été achetées dans un magasin. Les petits agriculteurs au sens de la PAC (c’est-à-dire produisant l’équivalent de moins de 92 tonnes de céréales par an) sont exonérés de cette rétribution.

Pour ce qui est de la vente des semences, celle-ci est encadrée et strictement régulée, avec un principe d’inscription au catalogue officiel de la variété pour permettre sa commercialisation (voir article n°2) et des exigences techniques et sanitaires (capacité à germer, absence de certaines maladies).

Depuis le 10 juin 2020, la vente directe aux particuliers de semences non protégées par un droit de propriété intellectuelle fait l’objet d’un assouplissement réglementaire : il n’y a plus d’exigences en matière d’inscription au catalogue de la variété, d’étiquetage ou de taux de germination, seul le respect des règles sanitaires s’applique.

5/ Les hybrides sont-ils stériles ? À quoi servent-ils ?

Les hybrides sont issus du croisement entre deux lignées. Alors qu’habituellement, pour la production agricole, on reproduisait entre elles des plantes d’une même variété, il a été constaté, pour certaines espèces, qu’en utilisant des fleurs mâles d’une variété et des fleurs femelles d’une autre variété, la descendance pouvait présenter des caractéristiques plus intéressantes que celles des parents. C’est l’effet hétérosis ou vigueur hybride.

Les plantes hybrides issues de ce croisement de deux variétés distinctes ne sont nullement stériles et produisent bien des graines.

Toutefois, à la génération suivante, la récolte est très hétérogène en raison d’un brassage génétique important, ce qui rend la reproduction des hybrides moins intéressante au niveau de la production agronomique.

L’effet hybride est plus marqué et ainsi exploité en grande culture chez les plantes allogames comme le maïs, le tournesol ou le colza, ayant un mode de reproduction basé sur la fécondation croisée entre deux plantes distinctes. Parmi les légumes, des espèces comme la tomate, le piment et le chou-fleur présentent une large part d’hybrides au catalogue officiel.

Pour certaines espèces, l’effet hybride étant particulièrement marqué et intéressant d’un point de vue agronomique, une majorité d’agriculteurs font le choix d’acheter ces semences hybrides plutôt que des semences issues d’une seule variété.