Un vétérinaire ausculte un chien dans son cabinet.
Pascal Xicluna / agriculture.gouv.fr

18 mars 2024 Info +

Ostéopathie animale : état des lieux du secteur, évaluation de l'épreuve d'aptitude et de l'enseignement dispensé

Jusqu'en 2011 en France, seuls les vétérinaires pouvaient exercer légalement l'ostéopathie animale.

Une ordonnance de 2011 [1] a ouvert l'exercice de l'ostéopathie animale à des personnes non vétérinaires. La mise en œuvre de cette ordonnance a mis fin à une longue période au cours de laquelle ces praticiens de l’ostéopathie animale étaient susceptibles de tomber sous le coup d’une condamnation pour exercice illégal de la médecine vétérinaire.

Les personnes réalisant des actes d’ostéopathie animale non vétérinaires interviennent sans être placés sous autorité médicale vétérinaire, ni à la suite de la délivrance d'une prescription ad-hoc. Aussi, une exigence particulière est portée à l'acquisition des compétences, notamment quant à leur capacité à évaluer une situation clinique, à établir un diagnostic ostéopathique et à déterminer et mettre en œuvre les manipulations adaptées. Ces pratiques doivent exclure tout risque d'aggravation de l'état de l'animal ou de remise en cause d'un diagnostic préalablement formulé par un vétérinaire.

À ce titre, seules les personnes inscrites sur le registre national d'aptitude, tenu par le conseil national de l'ordre des vétérinaires (CNOV), peuvent légalement réaliser ces actes. L'inscription sur ce registre est subordonnée à la réussite d'une épreuve d'aptitude dont le jury est présidé par le président du CNOV ou son représentant.

Au 1er février 2023, le registre national d’aptitude comportait 938 personnes inscrites.

Après cinq années de fonctionnement du processus réglementaire relatif à l'ostéopathie animale, une mission d'évaluation de ce dispositif a été confiée au conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) afin d'éclairer l'opportunité d'éventuelles évolutions.

Le rapport « Ostéopathie animale : évaluation du dispositif de l’épreuve d’aptitude et de l’enseignement dispensé par les établissements de formation » a été publié sur le site internet du Conseil général de l’agriculture, de l’alimentation et des espaces ruraux.

Cette mission a fait les constats suivants :

Une insertion professionnelle difficile

La mission constate que le jeune réalisant des actes d’ostéopathie animale rencontre des difficultés pour vivre de son métier dans les premières années d’exercice, quand il n’est pas vétérinaire.

Elle s’est fondée sur un sondage réalisé auprès de 332 praticiens. Ce sondage montre que les revenus libéraux sont d’un montant d’environ 470 euros/mois en première année d’installation, 1 200 euros/mois en 3e année après l’installation et 1 900 euros/mois en 5e année.

Il en résulte la nécessité d’être souvent en poly-activités les premières années d’exercice du métier pour disposer d’un revenu qui permette de vivre dignement. L’importance des abandons de la pratique de l’ostéopathie animale n’est pas documentée.

Les témoignages recueillis par la mission montrent que les perspectives de développement de l’ostéopathie animale sont en demi-teinte. La discipline est certes portée par la vague du soin alternatif et du bien-être, disposant d’un terrain favorable notamment sur les animaux familiers, mais la démographie croissante et le risque de paupérisation induit constituent une source d’inquiétudes.

L’entrée dans cette activité libérale et solitaire apparaît économiquement difficile et interroge sur l’information et la préparation à l’entrée dans la vie active de ces personnes réalisant des actes d’ostéopathie animale sans être vétérinaire.

De nombreuses formations de qualité hétérogène

À la date du rapport, soit à la mi 2023, la mission dresse le constat d’une multiplication récente des organismes de formation (16 écoles créées en 12 ans, dont 11 ces 5 dernières années), toutes privées, sous statut d’enseignement supérieur libre ou d’organisme de formation continue, et d’une grande hétérogénéité quant aux contenus des formations dispensées qui, pour certaines, peinent à valider le respect de certains critères pourtant essentiels touchant au niveau des compétences professionnelles requises.

La croissance rapide du nombre d’établissements de formation, et donc d’apprenants formés interroge sur leur capacité d’insertion dans le monde du travail. En rapprochant différentes sources, la mission estime actuellement entre 2 100 et 2 300 le nombre d’apprenants dans les formations à l’ostéopathie animale.

Les pourcentages de réussite aux épreuves obligatoire d’admissibilité et d’admission à l’issue des cinq ans de formation, dont la réussite est indispensable pour l’inscription sur le registre national d’aptitude tenu par le CNOV, in fine pour réaliser légalement des actes d’ostéopathie sur les animaux, sont les suivants :

  • épreuve d’admissibilité, de 2018 à 2022, 805 candidats ont validé l’épreuve pour 1 681 passages soit un taux global de réussite de 47,9%,
  • épreuve d’admission, de 2018 à 2022, 708 candidats ont validé l’épreuve pour 1 143 passages soit un taux global de réussite de 61,9%.

Les matières qui concentrent les taux d’échecs les plus importants sont la physiologie, la biologie, l’alimentation et la pharmacie.

Cette épreuve d’aptitude obligatoire a le mérite d’évaluer de façon exigeante les compétences et d’éviter les conflits d’intérêts entre les écoles. La mission estime que le dispositif de l’épreuve d’aptitude confié au Conseil national de l’ordre des vétérinaires (CNOV) doit perdurer pour garantir la qualité et la sécurité des soins aux animaux.

La mission considère le recrutement d’apprenants post Bac+2 avec un bagage scientifique comme une mesure de seuil à explorer, dans la mesure où elle favorise la réussite des jeunes et évite les écueils existant en cas d’échec pour se réorienter.

Les évolutions qui seront apportées suite aux recommandations de la mission

Dans le prolongement des recommandations de la mission, le CNOV s’est engagé à augmenter les capacités d’accueil des candidats aux épreuves, réduire les délais de passage, simplifier et réorganiser l’élaboration des QCM et améliorer la formation des jurys de l’épreuve pratique, au besoin par l’ouverture d’un troisième centre d’examen. L’instance unique traitant de toutes les questions de l’épreuve d’admissibilité composée à la fois de praticiens ayant réussi l’épreuve d’aptitude et de vétérinaires pratiquant l’ostéopathie sera renforcée.

Les informations sur l’ostéopathie animale – et plus particulièrement sur les établissements de formation disponibles sur internet – sont actuellement éparses, imprécises et pour certaines non fiables. Or, l’accès à une information transparente, précise et fiable par les citoyens est indispensable pour réaliser des choix éclairés.

Le ministère chargé de l’agriculture, en s’appuyant sur l'office national d'information sur les enseignements et les professions (Onisep) et le centre d'information et de documentation jeunesse (CIDJ), ainsi que les relais de la presse spécialisée, va promouvoir l’accès à une information transparente et objective sur le métier, les formations et l’épreuve d’aptitude des futurs apprenants. Par ailleurs, la publication par le CNOV des indicateurs de réussite à l’épreuve d’aptitude par établissement de formation pour une question de transparence de l’information vis-à-vis du public devra être sécurisée juridiquement.

Enfin, le ministère engagera une réflexion au sein des acteurs de l’ostéopathie animale et des organismes de formation, pilotée par un expert de haut-niveau extérieur et légitime, pour l’élaboration d’un référentiel commun de compétences.

[1] Ordonnance n° 2011-862 du 22 juillet 2011 relative à l'organisation de l'épidémiosurveillance, de la prévention et de la lutte contre les maladies animales et végétales et aux conditions de délégation de certaines tâches liées aux contrôles sanitaires et phytosanitaires.