15 mars 2023 Publication

Moyens et gouvernance de la politique de santé environnement

  • Agnès MOUCHARD (IGEDD )
  • Nicolas CLOÜET (IGA)
  • Dominique GIORGI et François MAURY (IGAS)
  • Sabine CAROTTI (IGESR )
  • Pascal HENDRIKX (CGAAER)

Une mission interministérielle composée de six inspections générales a dressé un inventaire des moyens consacrés à la politique de santé environnement de 2015 à 2021 par l’État, les collectivités territoriales et l’Union européenne, et formulé des propositions pour renforcer la gouvernance de cette politique.

En-tête Lettre CGAAER 174
© lecese.fr

Enjeux

Depuis la parution du 1er Plan national santé environnement (PNSE) en 2004, le pilotage de la politique de santé environnement s’est largement diversifié au moyen de nombreux plans sectoriels, plans régionaux de santé environnement et politiques des collectivités territoriales. Cette diversification se traduit par un manque de visibilité sur le niveau de financement de la politique santé environnement et une grande difficulté à en évaluer l’efficacité au regard des moyens mobilisés.

Une mission interministérielle composée de six inspections générales (CGAEER, IGA, IGAS, IGEDD, IGÉSR, IGF) a ainsi été chargée de dresser l’inventaire des moyens consacrés à la politique de santé environnement de 2015 à 2021 par l’État, les collectivités territoriales et l’Union européenne. Elle a également formulé des propositions pour renforcer la gouvernance de cette politique.

Méthodologie

La mission interministérielle, composée de Nicolas Cloüet de l’IGA, Dominique Giorgi et François Maury de l’IGAS, Agnès Mouchard de l’IGEDD, Sabine Carotti de l’IGÉSIR, Vincent Lidsky de l’IGF et Pascal Hendrikx du CGAAER, a tout d’abord défini le périmètre de la santé environnement pour déterminer le champ des investigations.

La mission a ensuite étudié les documents budgétaires de tous les ministères concernés pour réaliser l’inventaire des moyens. Les recommandations en matière de gouvernance se sont appuyées sur les entretiens réalisés et l’analyse des rapports déjà produits sur le sujet.

Résumé

La santé environnement est mal identifiée sur le plan budgétaire. L’analyse de 39 programmes (13 missions) du budget général de l’État a révélé que 28 d’entre eux comportaient des crédits relevant de la santé-environnement. Pour les sept années (2015-2021), le total des programmes hors titre 2 avoisine 5 milliards d’euros et est principalement dépensé via des opérateurs (CNRS, ANSES, Santé Publique France…) ; les crédits relevant des charges de personnel (titre 2), identifiés dans seulement quatre ministères, s’élèvent à 370 M€ par an. En moyenne, ils représentent de 0,3 % du budget général.

De plus, les dépenses du compte d'affectation spéciale d'aide à l’achat de véhicules propres, qui ressort de cette politique, se sont élevées sur ces sept ans à 4,2 milliards d’euros. À noter que hors titre 2, les missions agriculture, recherche et écologie constituent plus de 80 % des financements de l’État à la santé-environnement.

Les dépenses des collectivités territoriales hors régions (eau, déchets) dépassent 4 milliards d’euros/an et avoisinent 2 % de leur budget. Les régions dépensent 130 M€/an (eau, déchets, air) soit 0,35 % de leur budget. La Sécurité sociale contribue pour 200 M€/an à cette politique (prévention des maladies professionnelles liées à l’environnement de travail…). Les bases de données ne permettent pas une réelle quantification des crédits de l’Union européenne.

Les dépenses pour la santé environnement sont donc en moyenne de 6 milliards d’euros /an : 66 % à la charge des collectivités territoriales, 30 % à la charge de l’État et 3 % pour la sécurité sociale.

La mission a établi la liste des facteurs liés à l’environnement ayant un impact sur la santé humaine et les a hiérarchisés.

À l‘instar du PNSE 4, elle recommande d’intégrer la santé environnement dans le concept « Une seule santé » qui permet une approche multisectorielle et multidisciplinaire de la santé.

La mission a ainsi formulé cinq recommandations pour renforcer la gouvernance de cette politique « Une seule santé » :
- L’élaboration d'une stratégie nationale, alors qu'à ce jour plusieurs stratégies sectorielles (stratégie nationale de santé, stratégie nationale de recherche, agenda 2030…) y font référence sans articulation évidente ;
- Une planification coordonnée des actions avec un plan « Une seule santé », intégrant de manière plus organisée et directive l'action publique (aujourd'hui, plus de 30 plans sectoriels) ;
- Une plus grande unité interministérielle pour piloter le plan « Une seule santé » : cette cohérence pouvant être assurée sous l'égide du Secrétariat général à la planification écologique (SGPE), en conservant, pour la prise de décision, la compétence du Comité interministériel de la santé (CIS) dont la formation restreinte comprendrait les directions générales de la santé, de la prévention des risques, de l’alimentation et celle de la recherche et de l’innovation, avec une association ou information systématique des autres ministères investissant de manière significative dans « Une seule santé » ;
- Une représentation citoyenne et professionnelle plus affirmée qui passerait par la création d'un Conseil national «Une seule santé », remplaçant le Groupe santé environnement (GSE) ;
- La transparence des moyens consacrés à la politique « Une seule santé » qui nécessite d'harmoniser les nomenclatures de dépenses, afin de mieux les identifier, et de les classer par catégorie de risque.

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