26 janvier 2024 Publication

Le développement des Groupements d'Employeurs (GE) agricoles

  • Bruno Gadoud
  • Geneviève Jourdier

Le CGAAER a été chargé d'une mission de conseil visant à étudier les Groupements d'Employeurs (GE) agricoles afin de sécuriser et renforcer les groupements existants et d’en développer éventuellement de nouveaux.

Bandeau de La lettre du CGAAER n°181 janvier 2024 Conseil général de l'alimentation de l'agriculture et des espaces ruraux. Ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire

Rapport de conseil n° 23032

Septembre 2023

Enjeux

Le secteur agricole est actuellement confronté à d’importants besoins de main d’œuvre. Le problème devrait même s'aggraver avec le départ à la retraite, dans les prochaines années et sans relève assurée, d’une forte proportion des exploitants agricoles.

Plus précisément, l’évolution de l’emploi dans le secteur agricole se caractérise par un double mouvement : d'une part, une baisse sensible du nombre d’exploitants et une chute très importante de la main d’œuvre familiale, et de l’autre, une augmentation du salariat permanent non familial et un fort accroissement du travail réalisé par des prestataires ou des tiers employeurs. Parmi ces derniers, se distinguent les groupements d’employeurs (GE) agricoles, structures associatives ou coopératives mettant leurs salariés à la disposition exclusive de leurs adhérents.

Les GE agricoles ont été identifiés par une mission précédente du CGAAER qui portait sur les « nouvelles formes de travail en agriculture » comme un modèle de réponse collective à des besoins de main d’œuvre individuels, susceptible de permettre la sécurisation des recrutements et de la gestion des ressources humaines.

Malgré l'intérêt de cette forme de travail au regard des enjeux de gestion de l’emploi agricole ainsi que d’attractivité et de fidélisation de la main d’œuvre, les GE agricoles ne représentent un canal de recrutement que pour une minorité des employeurs et de façon très hétérogène selon les filières de production et les territoires. Le CGAAER a donc été chargé d'une mission de conseil dans l'objectif de sécuriser et renforcer les groupements existants et d’en développer éventuellement de nouveau.

Méthodologie :

Après une phase d’analyse documentaire, la mission a, dans un premier temps, entendu une cinquantaine de personnes dont les services centraux des ministères chargés de l'agriculture et du travail, la Mutualité sociale agricole (MSA) et les organisations nationales professionnelles.

Puis la mission a rencontré une vingtaine de GE agricoles dans dix départements, soit une trentaine de personnes, couvrant la diversité des types de groupements et des productions agricoles.

Résumé :

Les GE ont été créés par la loi du 25 juillet 1985. Ils se sont principalement développés en agriculture, même s’il en existe dans d’autres secteurs. Leur nombre total tous secteurs confondus est mal connu étant toutefois noté que la MSA en comptabilise, en 2022, 3 724 en production agricole. C’est pourquoi il conviendrait, pour la mission, de se doter d’un observatoire des GE afin de pouvoir tous les identifier quel que soit leur secteur d'activité.

L'emploi salarié agricole s'est considérablement accru dans les GE de la production agricole lors de la dernière décennie, passant de plus de 16 000 équivalents temps plein (ETP) en 2010 à 30 000 ETP en 2021. Ce doublement est dû à un accroissement non pas tant du nombre de groupements que du nombre d’emplois par GE (de 4,9 ETP en 2010 à 8,7 ETP en 2022). Le nombre de CDD est passé de moins de 48 000 en 2010 à plus de 108 000 en 2022, et le nombre de CDI a progressé également, mais moins fortement, de 13 000 en 2010 à 20 000 en 2022.

Aussi, pour consolider ce développement des GE agricoles, il conviendrait de fédérer au niveau départemental les acteurs de l’emploi salarié agricole dans un guichet unique, de former les agriculteurs à la fonction d’employeur et d’encourager les GE agricoles à s’articuler à un groupement d'employeurs pour l'insertion et la qualification (GEIQ).

Pour autant, la question de la poursuite du développement des GE agricoles, voire de leur pérennité se pose.

Tout d’abord, les GE sont mal connus des entreprises comme des salariés. C’est pourquoi il s’agirait de communiquer davantage sur les métiers de l’agriculture et les compétences recherchées ainsi que sur les opportunités en termes d’emplois dans ce secteur, dont plus particulièrement l’emploi à temps partagé au sein des GE agricoles.

Par ailleurs, le décompte des effectifs dans les GE, qui intègre désormais les salariés mis à disposition, est défavorable à l’emploi partagé tant en termes de cotisations que de formation. Pour y remédier, il conviendrait de fixer des taux de cotisations sur les emplois des GE agricoles identiques à ceux supportés par les entreprises de moins de 11 salariés, taille de la très grande majorité des entreprises utilisatrices des GE, et de permettre aux GE agricoles d’accéder aux dispositifs de formation des entreprises de moins de 11 salariés.

Enfin, comme les membres d’un GE sont solidairement responsables de ses dettes, il serait nécessaire que les GE agricoles soient reconnus comme créanciers privilégiés en cas de défaillance d’entreprises adhérentes.

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