« La COP22, une mise en musique de l’accord de Paris »
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Nathalie Guesdon est cheffe du bureau changement climatique et biodiversité au Ministère de l'Agriculture, de l'Agroalimentaire et de la Forêt. Retour sur les avancées de la COP21 pour décrypter les enjeux de la COP22.
L’accord de Paris est entré en vigueur le 4 novembre 2016. Une victoire pour le climat ?
A ce jour, plus de 95 pays ont ratifié l’accord de Paris, suite aux négociations tenues lors de la COP21 en décembre 2015, représentant plus de 70% des émissions de gaz à effet de serre mondiales, ce qui est une prouesse en moins d'un an ! Ils s’engagent à limiter le réchauffement climatique global bien en deça de 2°C par rapport à l’ère préindustrielle, voire à 1,5°. Pour de nombreux autres pays, le processus de ratification est en cours.
C’est un accord historique. Chaque pays a mis sur la table ses engagements quantifiés de réduction d'émissions de gaz à effet de serre. Par exemple, l’Europe a décidé de réduire de 40% ses émissions d'ici 2030. L’originalité de l’accord - et sa force - réside dans son caractère « bottom up » (initiative du niveau d'ambition laissée aux pays) et non « top down ». C’est ainsi que la Chine et les Etats-Unis ont ratifié l’accord simultanément en septembre dernier, ce qui représente un symbole très fort.
Nous avons vécu un véritable événement historique et diplomatique : 150 chefs d’Etat se sont mobilisés pour la COP21 : pour les COP précédentes, seuls les ministres venaient aux négociations.
La COP21 et l’accord de Paris, une grande avancée pour l’agriculture et la forêt ?
A la COP12 de Nairobi en 2006, la première COP à laquelle j'ai participé, l'agriculture n'était pas abordée en tant que telle dans les négociations. La forêt l'était déjà, sur le volet lutte contre la déforestation. Depuis, l’enjeu de la sécurité alimentaire mondiale face aux bouleversements climatiques a été reconnu dans les négociations et notamment dans l'accord de Paris. Le Fonds vert pour le climat peut ainsi financer des projets en agriculture et en forêt.
Le lancement officiel de l’initiative 4 pour 1000 lors de la COP21 a été un succès pour le ministère. Faire reconnaître que l’agriculture et la forêt font partie des solutions et ont un rôle à jouer dans la captation du carbone est un enjeu de taille ! De nombreux pays et organisations ont rejoint l’initiative. La dynamique est lancée.
Quelles positions défend le ministère de l’Agriculture, de l’Agroalimentaire et de la Forêt pour la COP22 ?
La France arrive au Maroc avec une délégation d'experts techniques de différents ministères et organismes publics. Réduire nos émissions de gaz à effet de serre est une urgence planétaire. Notre mandat ? Faire reconnaître les spécificités de l’agriculture : son rôle nourricier, les enjeux de sécurité alimentaire, son caractère multifonctionnel dans ses dimensions économiques, environnemental et social. Promouvoir l’agro-écologie et le 4 pour 1000 : proposer une transition vers des systèmes alimentaires améliorant la sécurité alimentaire de manière durable, des systèmes d’élevage moins émetteurs de gaz à effet de serre, un développement de l'agroforesterie qui protège les sols par exemple. Pour la forêt, promouvoir la gestion durable et la lutte contre la déforestation.
Quels sont les objectifs du gouvernement français pour ces négociations ?
L’enjeu de la COP22 est de rendre l'accord opérationnel. On entre dans des chantiers techniques pour mettre en musique l’accord. De nombreux ateliers se tiennent entre les experts pour mettre en commun les expériences, faire circuler les informations, sensibiliser à certaines techniques, orienter les financements, les méthodologies de comptabilisation, les inventaires…
Quelle sera la feuille de route du ministère et de ses négociateurs Climat après la COP22 ?
La déclinaison des enjeux climat dans nos politiques. Nous contribuons à la mise en œuvre des plans de réduction des émissions et d'adaptation au niveau national, en lien avec le ministère en charge de l'environnement. Par exemple la mise en œuvre du 4 pour 1000. Il y a un boulevard pour la recherche et l'amélioration des pratiques. Jusqu’à présent, l’inventaire des stocks de carbone dans les sols est assez « grossier » ; nous devons à présent prendre en compte les différentes pratiques agricoles pour en mesurer les impacts climat.
L'agroforesterie est aussi un levier important pour l'atténuation et l'adaptation, grâce aux bénéfices que rendent les arbres combinés aux productions végétales ou animales. Ces enjeux sont également pris en compte dans les réflexions sur la PAC post 2020. Nous devons inciter, accompagner nos secteurs vers des systèmes de production plus sobres en carbone et agro-écologiques.
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