Politique de prévention et de lutte contre l’incendie de forêt dans un contexte d’extension et d’intensification du risque dû au changement climatique - Tome 1 et 2
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Le CGAAER, l’IGA et l’IGEDD ont été chargés de faire des propositions au gouvernement pour renforcer les politiques de prévention et de lutte contre l’incendie de forêt dans un contexte d’extension et d’intensification du risque dû au changement climatique.
Enjeux
Face aux évolutions de plus en plus préoccupantes du risque « feux de forêt » dans le contexte du changement climatique, le ministre de l’intérieur, le ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire, la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et la secrétaire d’Etat chargée de la biodiversité ont confié au CGAAER, à l’inspection générale de l’administration (IGA) et à l’inspection générale de l’environnement et du développement durable (IGEDD) deux missions relatives, d’une part, à l’intensification du risque d’incendies de forêt et d’autres végétations et à l’extension des zones à risque, à échéances du milieu et de la fin du siècle, et, d’autre part aux politiques de prévention contre les incendies de forêts et autres végétations.
Dans ce cadre le CGAAER, l’IGA et l’IGEDD ont été chargés de faire des propositions au Gouvernement pour renforcer les politiques de prévention et de lutte contre l’incendie de forêt.
Méthodologie
Les deux missions se sont rapprochées pour traiter de manière unifiée les lettres de commande. Elles étaient composées de Christophe LEURET, Frédéric MORTIER de l’IGEDD, de Philippe CANNARD de l’IGA, de Vincent PIVETEAU et Jean-Maurice DURAND du CGAAER.
Le rapport est par conséquent constitué de deux tomes. « Faire face à court terme » et « S’adapter au changement d’ère : apprendre à vivre avec le feu pour les moyen et long termes ». La mission a rencontré un très large panel d’acteurs (environ 1000 personnes) au niveau national ainsi que dans les territoires historiquement touchés par les incendies et ceux où le risque d’extension émerge. Par ailleurs, la mission a procédé à la synthèse des études scientifiques les plus récentes concernant les projections climatiques jusqu’à 2100.
Résumé
L’analyse des modélisations climatiques les plus récentes, en se plaçant dans une gamme de scénarios plausibles du GIEC, présente un panorama très préoccupant. Les projections montrent une exacerbation de la vulnérabilité au feu dans les zones déjà particulièrement touchées, une extension de l’aléa prenant en écharpe une vaste zone du Sud-Est à l’Ouest, ainsi qu’une intensification dans le Sud-Est et le Sud-Ouest. La sensibilité de la végétation, augmentera encore après 2050, avec la progression des territoires classés très sensibles.
Selon les scénarios, ces derniers couvriraient entre 30 et 40 % de la surface totale de la végétation dans la deuxième moitié du siècle. On assistera à un allongement important de la « saison feu » de mars à octobre. À cela s’ajoute une probabilité accrue de concomitance de feux de grande ampleur et un accroissement notable de leur puissance. Dans ce contexte, quatre axes clés d’action ont été identifiés.
Le premier axe porte sur le développement d’une approche intégrée qui va de la prévention à la lutte. Un effort important sur l’acculturation au risque incendie de végétation est urgent. La mission fait des recommandations sur la conduite des obligations légales de débroussaillement. La réalisation plus systématique des plans de protection de la forêt contre les incendies (PPFCI), la mise en œuvre des procédures de classements des massifs à risque et la déclinaison de mesures déjà ouvertes par le code forestier nécessitent de conforter au plus près du terrain les moyens d’ingénierie, en effectifs et compétences. Les moyens de surveillance doivent être renforcés et organisés ou, s’agissant des nouvelles technologies, expérimentés et déployés. La planification des moyens de lutte au sol doit être accompagnée d’un programme de formation accéléré des sapeurs-pompiers et d’un déploiement géographique des moyens aériens. Enfin, dans une perspective de long terme, il faut réfléchir à une méthodologie de décision hiérarchisant les enjeux au regard de la « priorité au vivant », de la « valeur du sauvé », ou de la défendabilité.
Il faut ensuite agir de façon simultanée et articulée sur tous les volets concernés de l’action publique. La mission identifie de nombreux leviers d’action dans les domaines de la sécurité civile, de la politique forestière, de la politique en faveur de la biodiversité, des politiques du climat, des politiques agricoles, de l’urbanisme et d’aménagement du territoire, des politiques de la recherche-développement-innovation, ou de la politique judiciaire.
La mise en place d’une gouvernance partagée, structurée et territorialisée constitue un troisième axe. Les structures de pilotage nationale et territoriales doivent être mieux définies et renforcées. La mission propose un mode opératoire au niveau national pour élaborer et faire vivre une stratégie co-construite de protection des forêts contre l’incendie. Elle préconise de renforcer le niveau régional, en mobilisant l’ensemble des acteurs publics autour d’un programme d’action défini de manière contractuelle. Le niveau départemental reste le niveau opérationnel de la prévention et de la lutte, où s’inscrivent des démarches de massifs en lien avec les communes et les établissements publics de coopération intercommunale. Une action à l’échelle européenne est également indispensable, les conséquences des incendies portant atteinte directement aux actions communautaires dans les domaines du changement climatique et de l’environnement. La mission souligne également l’importance d’inscrire les actions de prévention et de lutte dans le cadre du débat public. La mission propose une action immédiate et différenciée selon trois zones : les « territoires historiques » du Sud-Est et du Sud-Ouest ; les « nouveaux territoires du feu », qui regroupent des départements de l’Ouest et Centre Ouest, jusqu’au Jura ; et les « territoires d’extension future ». Enfin, la mission invite à poursuivre une réflexion spécifique sur les territoires concernés des Outre-Mer.
Le dernier axe concerne la mobilisation des moyens de manière élargie, coordonnée et le développement d’effets de synergie. La mission explore la possibilité de mobiliser davantage l’assurance, pour renforcer et inciter à la prévention et à la bonne gestion. Elle fait également des propositions dans le domaine fiscal, afin de dégager des marges de manœuvre nouvelles et propose un projet de plan d’action ainsi qu’un vade-mecum, qui recense les leviers et actions à mettre en œuvre à l’échelle territoriale.