27 janvier 2015 Publication

Synthèse des audits de l’utilisation du Fonds européen pour la pêche (FEP) en France

  • Bertrand Gaillot
  • Paul Reichert

En 2014, le CGAAER a réalisé 65 des 71 audits de contrôle des opérations cofinancées en France par le Fonds européen pour la pêche (FEP) au cours de l’année 2013. Elles représentent un montant d’investissement de l’ordre de 47 millions €, soit près de 40% des dépenses déclarées à la Commission pour cet exercice. Le taux des dépenses estimées irrégulières a été établi à 4,55 %.

Chalutier manœuvrant dans le port de la Turballe © Pascal Xicluna / Min.agri.fr

Synthèse de rapports d’audit CGAAER

Synthèse des audits de l’utilisation du Fonds européen pour la pêche (FEP) en France

Bertrand Gaillot, Paul Reichert

Janvier 2015

Mots clés : Aides publiques ; sortie de flotte ; pêche maritime ; fonds européen ; politique agricole de la pêche

Chalutier manœuvrant dans le port de la Turballe

© Pascal Xicluna / Min.agri.fr

Contexte

Le programme 2007-2013 de mise en œuvre du Fonds européen pour la pêche (FEP) est défini par un règlement du Conseil de l’Union européenne de juillet 2006.

Le programme opérationnel de la France pour ce fonds d’investissement est validé par la Commission européenne. Il est soumis à des audits de système et à des contrôles d’opérations, permettant de vérifier la conformité des dépenses engagées au regard des règles européennes et nationales.
Le CGAAER est membre de la Commission interministérielle de coordination des contrôles (CICC) qui est l’autorité d’audit de l’ensemble du dispositif.
Les erreurs identifiées lors des contrôles d’opérations font l’objet de corrections financières impactant les bénéficiaires.

Quelques rappels à propos du FEP

Au cours de la période 2007-2013, le FEP a été l’un des principaux instruments des investissements réalisés au titre de la Politique commune de la pêche. Pour la période 2014-2020, un nouvel instrument financier, le Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (FEAMP), se substitue au FEP.
Les principaux objectifs recherchés au travers des soutiens financiers du FEP étaient d’assurer la pérennité des activités de la pêche et l’exploitation durable des ressources halieutiques :

Image retirée. en réduisant la pression sur les stocks et en équilibrant les capacités de la flotte communautaire par rapport aux ressources disponibles ;
Image retirée. en renforçant le développement d’entreprises économiquement viables dans le secteur de la pêche et en rendant les structures de l’exploitation des ressources plus compétitives.

Pour faciliter la gestion et bénéficier des aides du FEP, chacun des États membres de l’Union européenne a soumis à la Commission un plan stratégique national déclinant les objectifs et les priorités nationaux pour la mise en œuvre de la Politique commune de la pêche (PCP).

Le plan stratégique sert de base à l’élaboration du programme opérationnel destiné à mettre en œuvre les politiques et les priorités appelées à être cofinancées par le FEP.

Le FEP s’est vu doté d’un peu plus de 4,3 milliards € pour la période de programmation 2007-2013 et pour l’ensemble des États membres de l’Union européenne. Les montants ont été répartis parmi les États membres selon l’importance du secteur de la pêche et le nombre de personnes actives dans la filière.

Le règlement du 27 juillet 2006, qui a institué le FEP, a défini les règles en matière d’éligibilité des dépenses, de gestion financière, de corrections financières, d’engagements budgétaires et de remboursement. Il établit un comité du fonds européen pour la pêche destiné à assister la Commission dans la gestion du FEP.

Conformément au règlement de base, la France a constitué un comité national de suivi et désigné trois autorités (de gestion, de certification et d’audit).

La Commission interministérielle de coordination des contrôles (CICC) est l’autorité d’audit qui donne un avis sur le fonctionnement du système de gestion et de contrôle des fonds FEDER, FSE et FEP notamment.

Au sein de la CICC, le CGAAER a la responsabilité de conduire les travaux d’audit relatifs au FEP, avec l’appui de l’équipe administrative de la CICC et en mobilisant ses propres moyens.
A ce titre, le CGAAER dispose d’un siège au collège de la CICC (un membre titulaire et un membre suppléant). Ces deux membres réalisent les audits de système, destinés à donner une note de confiance au système de gestion et de contrôle. Le CGAAER s’implique par ailleurs dans la réalisation des contrôles d’opérations annuels prévus dans le cadre des activités d’audit.

L’ensemble de ces travaux d’audit doit permettre aux autorités françaises de donner une assurance raisonnable de bonne gestion de la partie du FEP qui est en « gestion partagée » avec la Commission européenne.
La CICC a chargé la première section du CGAAER de la maîtrise d’œuvre des contrôles des dépenses dans le cadre du FEP.

Les enjeux

Ils sont de trois ordres : politique, économique et budgétaire.

Sur le plan politique, la France a soumis à la Commission un plan stratégique national assorti d’un programme opérationnel. Elle s’est engagée au strict respect de l’ensemble des dispositions du règlement du FEP et celles d’origine nationale. La crédibilité de l’État français serait remise en cause en cas de défaillances, graves et réitérées, constatées par la Commission dans l’application de ce règlement.

Sur le plan économique, l’instrument financier que représente le FEP est avant tout un levier de modernisation et de développement durable de toute une filière. Les audits et contrôles d’opérations effectués par l’autorité compétente ont pour objectif de vérifier que les fonds publics communautaires et nationaux ne sont pas utilisés à d’autres fins et ainsi d’apporter la garantie aux instances européennes (Commission, Conseil, Parlement) de la bonne utilisation des financements engagés.

Sur le plan budgétaire, le règlement du FEP prévoit un système de corrections financières en cas de non conformités.
Il s’agit de l’amputation pure et simple, proportionnelle au taux d’anomalies constaté, d’une partie des versements de crédits du budget de l’Union européenne à celui de l’État membre bénéficiaire. Ce dernier n’a donc d’autre choix que d’instaurer un dispositif performant de contrôle pour limiter, autant que possible, les anomalies (et les fraudes) dans l’utilisation des crédits du FEP.
Sont concernés en particulier l’éligibilité des dépenses, le respect des plafonds d’aides publiques, les taux de cofinancement, les contraintes de la commande publique, les procédures de programmation, les enregistrements et suivis comptables...

Tout au long de l’application du programme, le maintien d’une pression constante de contrôles et de l’exploitation de leurs résultats tend à l’amélioration progressive de l’ensemble du dispositif.

Méthodologie

Les contrôles des opérations cofinancées par le FEP répondent aux règles suivantes.
Un échantillon des dépenses certifiées à la Commission par l’autorité de gestion pour une année N est soumis à contrôle en année N+1.
L’échantillonnage est réalisé de manière aléatoire par l’autorité d’audit (la CICC) à l’aide d’une méthode statistique (prévue par le cadre réglementaire du FEP). Le nombre d’opérations à contrôler est fonction du volume de crédits européens mis en œuvre pour les conduire à bien.
Ainsi, en 2014, ce sont 71 opérations qui ont été tirées au sort, représentant près de 47 millions € de crédits FEP (sur 121,8 millions € pour l’ensemble de l’année).

Sept membres du CGAAER et un inspecteur général des affaires maritimes ont été désignés en janvier 2014 pour conduire ces contrôles sous l’autorité du président de la CICC et avec l’appui juridico-administratif de ses services (six contrôles en Corse et en Outre-Mer ont été confiés aux SGAR concernés).

Regroupées par régions, les opérations tirées au sort ont ensuite été réparties entre les contrôleurs. Il s’agit, pour chaque opération à contrôler, de suivre une piste d’audit pour juger de la conformité du fond, de la forme et des aspects financiers au regard des prescriptions du règlement communautaire et des règles nationales.
Pour ce faire, le contrôleur d’opération examine l’ensemble des pièces constitutives du dossier, d’une part auprès du service instructeur, d’autre part chez le bénéficiaire.
Il doit vérifier la présence des documents exigés par la procédure (de la demande initiale du pétitionnaire jusqu’au versement du solde), leur complétude et leur cohérence (dates, signataires, respect des engagements calendaires).
De plus le contrôleur a pour obligation d’analyser les pièces comptables (en totalité ou par sondage) relatives aux dépenses cofinancées par le FEP (engagements financiers, preuves de versement, factures, autres justificatifs de dépense, traduction en crédits et débits sur les comptes bancaires du bénéficiaire...).
Dans le cas où le bénéficiaire est un organisme public (ou assimilé au sens communautaire), le contrôleur doit s’assurer que toutes les procédures relatives à la commande publique ont bien été respectées (publicité, délais, appel d’offres, transparence des décisions...).
L’ensemble des constats du contrôleur est alors repris dans différents tableaux préformatés qui constituent un rapport provisoire transmis pour validation par le représentant du CGAAER, membre de la CICC.

Au-delà, plusieurs étapes successives (comprenant une phase contradictoire), dont l’issue était programmée pour la fin septembre 2014, ont été mises en œuvre et ont abouti à la prise des décisions par la CICC sur la conformité de l’opération ou au contraire la présence d’anomalies, avec ou sans conséquences financières potentielles (la mise en œuvre en incombe à l’autorité de gestion).

Résultats

Sur les 71 opérations contrôlées en 2014, représentant environ 47 M € de crédits issus du FEP, douze ont présenté des irrégularités confirmées après la phase contradictoire. Certaines d’entre elles présentant plusieurs anomalies, le nombre total des irrégularités retenues s’élève à seize.
Le montant financier correspondant à ces seize cas est de 3,96 M €, soit un taux « brut » de 8,4 %d’irrégularité.
Cependant, après application de la méthode statistique imposée par la Commission, ce montant se trouve extrapolé à 5,8 M €, rapporté à 121,8 M € (montant annuel total des crédits du FEP dépensés par la France en 2013), soit au final un taux d’anomalies de 4,55 %retenu pour notre pays.
Selon leur nature, les irrégularités constatées en 2014 (sur les opérations 2013) se répartissent dans le schéma suivant :

L’autorité de gestion est destinataire de l’ensemble des constats établis lors de ces contrôles ainsi que de leurs résultats. Elle les utilise aux fins d’amélioration constante de la conduite du dispositif.
L’autorité de gestion du FEP a procédé aux corrections financières résultant des constats d’irrégularités. Ces corrections ont permis de ramener le taux d’erreur résiduel en dessous du seuil de 2 % , permettant à l’autorité d’audit, la CICC, de donner un avis sans réserve sur la gestion du FEP par la France en 2014.


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