26 novembre 2012 Info +

A la Réunion, Sergio Victoire montre l'exemple aux producteurs de chouchous

Producteur de chouchous à Salazie, sur l’île de la Réunion, Sergio Victoire s’est engagé dans le projet Gamour, en lien avec l’objectif du plan Ecophyto. Aujourd’hui, il n’utilise plus de pesticides et transmet son savoir-faire aux agriculteurs de la région.


Sergio Victoire est un chanceux. Dans les années 1990, il implante son exploitation maraîchère au cœur du Cirque de Salazie, poumon vert de la région, vallée luxuriante idéale pour la culture de bananes et de chouchous [1]. Un cadre de travail pour le moins idyllique, où le cultivateur a longtemps mené une agriculture intensive.

« Lorsque ma génération a débuté dans la profession, la règle était de produire à tout prix, de désherber massivement les parcelles pour un meilleur rendement », se souvient Sergio Victoire. « Mais nous avons abusé de ces techniques. Aujourd’hui, j’ai pris un virage radical dans ma façon de produire. »

Virage radical

Un virage que l’agriculteur opère fin 2009, persuadé qu’il existe des méthodes alternatives à l’utilisation de produits phytopharmaceutiques, meilleures pour la santé humaine et pour l’environnement.

« Cette année-là, je me suis lancé dans un essai avec le Cirad [2] et j’ai suivi le projet Gamour [3], pour maîtriser les mouches des légumes. »

En pondant leurs œufs dans les chouchous, les mouches des légumes peuvent détruire jusqu’à 60%des récoltes. Elles sont un véritable fléau sur les exploitations légumières de l’île.

Une des techniques du projet Gamour consiste à isoler les chouchous infestés dans une tente, pour éviter que les œufs qui y sont pondus ne donnent naissance à des centaines de mouches.

De cette tente, les mouches ne peuvent pas sortir mais des auxiliaires de culture (des petites guêpes, surtout), sont capables d’y entrer et de détruire les larves.

Second souffle pour l’écosystème

Une méthode qui donne un second souffle à tout l’écosystème de l’exploitation : dans le but de faire revenir les auxiliaires de culture, Sergio Victoire a arrêté de désherber sous les treilles. En préférant un enherbement naturel maîtrisé, il aide les sols à se repeupler et ralentit leur érosion.

Aujourd’hui, au bout de trois ans, le maraîcher a réussi à éliminer 95%des mouches qui piquent sur son exploitation ; il n’utilise plus aucun pesticide et espère obtenir un agrément d’agriculture biologique courant 2013.

Et même si cette méthode requiert une main d’œuvre supplémentaire pour entretenir l’enherbement des treilles, les agriculteurs des environs y voient la preuve qu’une agriculture économe en produits phytopharmaceutiques peut exister et perdurer.

« Ceux qui ne voulaient pas entendre parler d’une baisse de pesticides viennent voir les résultats de mon exploitation, et beaucoup s’en inspirent », se réjouit Sergio Victoire. « Hier encore, j’ai vu qu’un voisin commençait l’enherbement sous les treilles, c’est très encourageant. »


[1] Aussi appelé "christophine" ou "chayote", le chouchou est un légume cultivé sous climats chauds (Antilles, Réunion, Île Maurice...)

[2] Centre de Coopération Internationale en Recherche Agronomique pour le Développement

[3] Gestion Agroécologique des MOUches des légumes à la Réunion