25 novembre 2015 Publication

Évaluation de la mise en œuvre des dispositions État/profession dans le bassin Adour-Garonne

  • Roland Renoult
  • Jean-Yves Grosclaude

En 2011, l'État et la profession agricole ont signé un protocole visant à adapter la gestion de la ressource en eau destinée à l'irrigation dans le bassin Adour-Garonne. Le CGAAER et le CGEDD ont été chargés d'évaluer l'état d'avancement de la mise en place de cet accord.

Le 12 novembre 2015, Bertrand Hervieu, vice président du CGAAER, a remis au ministre le rapport sur le bassin Adour-Garonne - © photothèque/Min.agri.fr

Rapport d'évaluation n°14145 CGAAER

Octobre 2015

Mots clés : Irrigation, Adour-Garonne, bassin

Enjeux

La loi sur l'eau de 2006 a initié une réforme de la gestion quantitative de l'eau en France. La notion de débits objectifs d'étiage (DOE) que doivent respecter les cours d'eau a été introduite.

Pour maintenir ces débits, une gestion prévisionnelle des volumes prélevables pour l'irrigation est rendue obligatoire. Il est prévu que ces volumes soient répartis entre les irrigants par des structures à créer, les Organismes uniques de gestion collective (OUGC). Très rapidement, il s'est avéré que ce mode de gestion de l'eau, et notamment le calendrier de son application, ne pouvaient être respectées dans une grande partie du bassin Adour-Garonne. En effet, les caractéristiques hydrologiques de ce territoire et l'usage de l'eau pour l'irrigation impliquent de lourdes modifications des pratiques et des investissements conséquents.

Afin de lever ces difficultés, l'État et la profession agricole ont signé des protocoles en 2011.
La profession s'engage à promouvoir le dispositif des OUGC.
L'État s'engage à accepter dans certains cas une gestion des prélèvements par les débits, au lieu d'imposer systématiquement la méthode des volumes. Face aux besoins en volumes mobilisables pour assurer les débits d’étiage, l’État s’engage à accompagner financièrement un programme de création de retenues.

Un ajustement du calendrier réglementaire pour atteindre les DOE est aussi prévu.

Un dernier principe a aussi été acté : une amélioration de l'efficience de l'usage de l’eau en particulier par des programmes d'économie. Cependant, le responsable de cette politique et ses modalités de mise en œuvre n'étaient pas précisés.

Méthodologie

Par lettre de mission datée du 8 décembre 2014, le CGAAER et le CGEDD ont été chargés d'évaluer l'état d'avancement de la mise en place de ces accords.

Cette mission a été réalisée par Hugues Ayphassorho, Geoffroy Caude, Noël Mathieu (coordonnateur), pour le CGEDD et Jean-Yves Grosclaude et Roland Renoult, pour le CGAAER.

La mission a recueilli l’avis, au plan national et dans les trois régions concernées par les protocoles (Poitou-Charentes, Midi-Pyrénées et Aquitaine) :
- des administrations centrales concernées (DEB-direction de l'eau et de la biodiversité et DGPE) ;
- des administrations régionales et départementales de l'État ;
- des organismes de bassin ;
- des chambres régionales de l’agriculture et des conseils régionaux ;
- des associations d’irrigants et des associations de protection de la nature.

La mission s’est déroulée dans un contexte de tension forte, en particulier en région Midi-Pyrénées, mais pas seulement, suite à l’épisode dramatique de Sivens survenu en 2014.

Résumé

La gestion de l’eau est par nature complexe, techniquement et administrativement. Sur un certain nombre de thématiques souvent techniques, chacun a tendance à donner sa propre définition et donc ses a priori, ce qui ne peut que fausser les débats entre acteurs. La mission s’est donc efforcée de rédiger un rapport pédagogique. Dans ce but, le rapport fournit de longs développements sur les notions de DOE (débits d’objectifs d’étiage) et de volumes prélevables, sur le contexte hydrologique et le changement climatique, l'économie agricole et l'eau dans le sud-ouest.

Les investigations de la mission ont permis de constater que le protocole avait eu un début d'application encourageant mais que des sujets majeurs n'avaient pas été mis en œuvre voire étaient inapplicables pour certains, au moins dans les délais prévus.

La mission a constaté avec satisfaction que quinze OUGC ont été mis en place avec la participation active de la profession agricole et selon une répartition territoriale adéquate. Cette recherche du bon niveau de gestion correspond à un effort certain de la profession car les limites de ces OUGC chevauchent le découpage des chambres d'agriculture. Pour autant, les missions dévolues aux OUGC n’ont pas encore toutes été déployées.

Quant aux retenues de substitution qu’il était envisagé de créer d’ici 2021 pour 69 millions de m3, très peu ont été réalisées. Il est certain que seule une très faible partie en sera installée à l'échéance prévue. L’instruction sur les projets de territoire, condition préalable à l’engagement des acteurs de terrain et à la participation financière de l’agence de l’eau, n’a été publiée que le 4 juin dernier après plus de deux années de consultation. Les autres volumes inscrits dans le protocole et notamment ceux liés à la gestion par les débits restent également hypothétiques.

De même, le plan d’accompagnement sur les économies d’eau n’a pas été véritablement engagé.

Forte des constats ci-dessus, la mission propose différentes orientations stratégiques. Elles peuvent constituer la base d’un plan d’action à construire par les acteurs de l’eau de ce bassin. Elles s'inscrivent dans le contexte de la nécessaire adaptation de l’agriculture du bassin au changement climatique et appellent à l'émergence d'une stratégie agricole au niveau régional, comme national, intégrant ou non la gestion de l'eau.

Lien vers le rapport


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