22 avril 2016 Publication

Cohérence de la mise en œuvre des réglementations applicables à l’espace forestier

  • Laurence Lefebvre

Alors que le programme national de la forêt et du bois sera publié en 2016, le CGAAER et le CGEDD ont été chargés d’une mission d’expertise sur la cohérence de la mise en œuvre des nombreuses réglementations applicables en forêt et qui relèvent de neuf codes différents

©Min.agri.gouv.fr

Rapport de mission interministérielle d'expertise n°15083 CGAAER - CGEDD

Février 2016

Mots clés : Forêt, réglementations, code forestier, urbanisme, environnement, paysage

Enjeux

L'année 2016 verra la publication du programme national de la forêt et du bois (PNFB) et la déclinaison de ses orientations stratégiques au sein des programmes régionaux correspondants (PRFB). Une gestion plus active des forêts et une récolte accrue de bois constituent deux objectifs majeurs du PNFB pour des forêts plus productives, en bonne santé et résilientes.

A cet effet, il est donc particulièrement important d’identifier les freins à la gestion des forêts qui est encadrée par le code forestier, notamment lorsque ces freins sont imputables à la superposition des nombreuses réglementations applicables à un même espace forestier et qui poursuivent des objectifs différents, parfois divergents.

Les difficultés font référence aux croisements du code forestier avec huit autres codes : codes de l’urbanisme, de l’environnement, rural, de la santé publique, du patrimoine, de la route, de la voirie, et des collectivités territoriales.

Méthodologie

La mission interministérielle était composée de Philippe Iselin et Dominique Stevens pour le CGEDD, de Laurence Lefebvre pour le CGAAER.

Elle a rencontré les principaux représentants des acteurs forestiers de l’amont de la filière forêt-bois, ainsi que les responsables et experts des services des administrations centrales concernées.

Face à la grande convergence des problèmes signalés par les forestiers, la mission s’est attachée à en analyser les raisons. Les difficultés d’interprétation ou de mise en œuvre des législations, ainsi que les contradictions qui les opposent, remettent en cause la sécurité juridique d’actes réalisés conformément au code forestier. Pour chacun des neuf codes concernés, elle a formulé des recommandations visant à résoudre les problèmes avérés.

Résumé

Tous les représentants de la filière forêt-bois rencontrés ont signalé leur grand intérêt pour cette mission. Celle-ci était d’autant plus attendue qu’une lecture asymétrique des législations applicables à la forêt est susceptible, de leur point de vue, d’interférer sur l’incitation qui leur est faite d’adopter une gestion plus dynamique, conciliant la production de bois, la préservation de la biodiversité et la mise en valeur des paysages.

En vertu du principe d’indépendance des législations, il est impossible d’établir une hiérarchie entre les réglementations s’exerçant dans l’espace forestier. Néanmoins, si le code forestier prévoit bien la prise en compte équilibrée des fonctions économique, écologique et sociale des forêts d’une part, et si les enjeux environnementaux actuels sont bien au cœur de la gestion forestière durable d’autre part, les acteurs forestiers ont le sentiment que le code forestier est systématiquement battu « sur son propre terrain » par les autres législations, alors même que les autorités publiques agissant pour la protection de l’environnement devraient systématiquement prendre en compte le droit forestier et s’y conformer. De même, les compétences dévolues aux maires ou aux collectivités, et leur permettant de réglementer certains aspects de la gestion forestière, ne devraient pas être source d’incohérences, voire de contradictions avec la politique forestière, qui relève de la compétence de l’État.

La mission identifie ainsi les situations où la superposition des différentes réglementations pose problème aux propriétaires et aux gestionnaires forestiers. Elles sont associées aux actes de gestion relatifs à la fonction de production (coupes et travaux). Ces actes sont encadrés strictement par le code forestier et se trouvent confrontés à la traduction opérationnelle de règles relatives à l’occupation des sols et à la planification spatiale, aux espaces et espèces protégés, au patrimoine naturel ou architectural, aux captages d’eau potable, à la réglementation des boisements, ou encore à la circulation sur le réseau routier public…

Pour chacun des codes concernés, la mission rappelle les enjeux de l’application des réglementations en forêt puis propose des solutions opérationnelles. Elle propose également quelques ajustements législatifs et réglementaires pour conforter la cohérence des dispositions applicables.

La mission recommande que des cadrages soient fournis aux services extérieurs de l'État notamment lorsque les réglementations sont du ressort des collectivités (classements des espaces boisés au plan local d’urbanisme, réglementation des boisements…), accompagnés d’actions de formation et de diffusion de bonnes pratiques (dans le guide prévu pour accompagner le nouveau règlement des PLU notamment). Il convient aussi de mieux faire connaître, à ceux qui n’en sont pas spécialistes, la portée du code forestier en termes de protection de l’environnement.

Dans l’objectif d’assurer la convergence des documents de planification régionale, la mission propose en conclusion que le PRFB soit promu comme le volet forestier du schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET). Elle propose également que la commission régionale de la forêt et du bois (CRFB) soit le lieu privilégié d’arbitrage des éventuelles difficultés et conflits liés à la mise en œuvre des réglementations en forêt.

Ces dispositions sont de nature à favoriser la mobilisation de toutes les parties prenantes autour des enjeux environnementaux majeurs associés à la gestion forestière, pour la contribution attendue des forêts à la stratégie nationale bas-carbone dans le respect de la biodiversité et des paysages.


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